JANCOVICI Jean-Marc, L’avenir climatique. Quel temps ferons-nous ?, édition Seuil Science ouverte, 2002
(284 pages, 8.1€)
Commentaire
« L’Avenir Climatique » (quel temps ferons nous ?) a été publié aux éditions du Seuil (collection Science ouverte) en mars 2002 (édition poche en 2005). Cette honorable maison devant maintenant beaucoup d’argent à son banquier, la réalisation de cet ouvrage et de ses 70 graphiques (soit à peu près la moitié de ceux que je souhaitais y mettre !) lui ayant coûté fort cher, j’ai décidé de faire mon possible pour éviter à cet investissement de mon éditeur dans l’énergie (dont il est abondamment question dans ce bouquin) d’être un peu moins hasardeux que ceux réalisés par Enron.
Pour vous aider à sortir 8 euros – une misère, quand on y pense – d’une cassette que je devine toujours trop peu garnie à votre goût, je vous propose de consulter ci-dessous les critiques de presse dont j’ai connaissance.
Erratum
- Page 38 : sur la figure 5, la formule du méthane est CH4, et non NH4 !!
- Page 44 : le nom de la référence de la figure 7 est inexact, il s’agit de JR Petit, du Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de l’Environnement (à Grenoble). Je lui adresse toutes mes excuses pour lui avoir substitué par erreur Jean Jouzel, un de ses collègues et co-auteur (mais non auteur principal) du numéro de Nature où cette courbe est parue. Cette même remarque vaut pour les courbes 11 (page 58) et 26 (page 96).
- Page 73 : dans le texte qui suit le tableau du milieu de page, le PRG à 20 ans du méthane a été indiqué par erreur à 56 (il s’agit aussi de 62, comme dans le tableau).
- Page 75 : les données de la figure 17 sont bien de 2000, et non de 1990 comme indiqué par erreur dans le texte juste au-dessus.
- Page 108 : en bas de la page, il faut lire « perte d’eau provenant de la transpiration » et non « perte d’eau provenant de l’évaporation » ; à l’évidence l’évapotranspiration n’est pas un processus de respiration !
- Page 114 : J’ai indiqué que le maximum de densité de l’eau était atteint à 4°C. Cela n’est vrai que pour l’eau douce, mais pour l’eau salée la densité augmente sans limite lorsque la température baisse, jusqu’à la congélation.
- Page 155 : L’échelle du graphique est en millions de tonnes, et non en milliards de tonnes comme indiqué par erreur !
- Page 162 : Le texte fait référence à la CEE, quand il faudrait lire « communauté européenne » (l’appellation CEE a disparu en 1993)
- Page 209 : le gain par kWh mentionné en bas de la page (sous-chapitre « substituer les combustibles fossiles ») est de 50% et non de 20% (ce qui se constate implicitement sur le tableau page 161). Le pourcentage de 20% correspond à l’ordre de grandeur du gain pour les émissions totales d’un pays qui passe du charbon au gaz pour sa production d’électricité (découle du tableau sur le bas de cette page).
- Page 242 : les attentats de septembre aux USA ont eu lieu en 2001 et non en 1991 !
- Page 284 : je me suis trompé dans les coefficients de conversion en mettant – je ne sais pas pourquoi – 44,6 GJ par tep au lieu de 42 GJ. Les bons chiffres de conversion sont les suivants :
Vaut... | Tonne de pétrole ou tep | Tonne de charbon ou tec | Joule | kWh PCI | kWh électrique | m3 de gaz | Tonne bois |
---|---|---|---|---|---|---|---|
1 Tonne de pétrole (tep) | 1 | 1,65 | 42 000 000 000 | 11 600 | 4494 | 1075 | 2,2 |
1 Tonne de charbon (tec) | 0,607 | 1 | 25 494 536 700 | 7041 | 2728 | 653 | 1,3 |
1 Joule | 2,4 10-11 | 3,9 10-11 | 1 | 2,8 10-07 | 1,1 10-07 | 2,6 10-08 | 5,3 10-11 |
1 KWh PCI | 0,000086 | 0,00014 | 3 600 000 | 1 | 0,387 | 0,093 | 0,00019 |
1 KWh électrique | 0,00022 | 0,00036 | 9 293 023 | 2,58 | 1 | 0,24 | 0,00049 |
1 m3 de gaz | 0,00093 | 0,00153 | 39 060 000 | 10,788 | 4,18 | 1 | 0,0021 |
1 Tonne bois | 0,45 | 0,74 | 18 900 000 000 | 5220 | 2022 | 484 | 1 |
La lecture de conversion se fait des lignes vers les colonnes.
Quelques critiques de la presse
La Météorologie, mai 2003 (Jean-Louis Vallée)
Jean-Marc Jancovici développe ici des thèmes qu’il n’avait fait qu’aborder avec Hervé Le Treut dans le petit livre L’effet de serre (Flammarion, collection « Dominos », 2001). L’auteur, ancien élève de Polytechnique, est ingénieur-conseil. Il intervient auprès de grandes entreprises ou de l’État sur les problèmes d’énergie et sur les questions liées à l’effet de serre.
Son ouvrage va beaucoup plus loin que la simple description habituelle de l’effet de serre et des prévisions des experts du Giec : pluridisciplinaire, il aborde tous les thèmes connexes (financiers, politiques, écologiques, énergétiques) d’un point de vue qui se veut objectif et sans à priori. Et il pose les grandes questions : «Doit-on réduire les émissions de gaz à effet de serre ?» et «Comment faire ?».
Les deux premières parties sont assez classiques : explications de l’accroissement de l’effet de serre, prévisions des modèles climatiques, changements climatiques attendus, risques encourus et implications pour les populations. Tout cela avec une approche scientifique qui ne masque pas les multiples incertitudes sur l’intensité et la localisation des phénomènes prévus.
Une troisième partie, «Qui est responsable ?», fait le point sur les émissions anthropiques de gaz à effet de serre (GES), leur évolution au cours de l’histoire, les pays responsables, les secteurs d’activité incriminés. On apprend ainsi qu’un habitant des États-Unis émet près de trois fois plus de GES qu’un Français, mais aussi qu’un Français consommé actuellement trois fois plus d’énergie qu’en 1960. L’auteur se demande au passage si l’Américain actuel est neuf fois plus heureux qu’un Français de 1960 ! Tous les secteurs d’activité sont passés en revue : énergie, transports, chauffage, industrie… Par exemple, pour l’agriculture française, plus du tiers de ses émissions de GES proviennent de l’usage des engrais (dégazage de N2O) et plus du tiers du méthane émis provient des ruminants.
La production d’un kilo de boeuf ou de mouton dégagerait autant de GES qu’une voiture roulant pendant cent kilomètres et dix fois plus que la production d’un kilo de porc ou de poulet ! Remarquons au passage que la question du méthane d’origine agricole est rarement approfondie dans la littérature : les ruminants domestiques produisent-ils vraiment plus de méthane que les ruminants sauvages qu’ils ont remplacés ? Et les rizières sont-elles beaucoup plus «polluantes» que les anciennes zones humides désormais drainées ?
La dernière partie est particulièrement intéressante et inhabituelle pour ce genre d’ouvrage : « Dans quel monde voulons-nous vivre ? ». L’auteur, après avoir évoqué les risques de désordres mondiaux liés au changement climatique, constate que le principe de précaution exige une importante réduction des émissions de GES. C’est surtout le domaine de l’énergie au sens large qui est abordé, puisque c’est le principal émetteur de GES. Le bilan est inquiétant : avec une croissance annuelle de la consommation mondiale d’énergie de 2%, les réserves prouvées et espérées de combustibles fossiles seraient épuisées en une centaine d’années et la concentration atmosphérique en CO2 serait de l’ordre de 2.000 ppm en 2100, sept fois plus que la concentration préindustrielle et deux fois plus que dans le scénario le plus pessimiste du Giec.
L’auteur calcule que les énergies renouvelables, pourtant indispensables, ne pourront pas produire autant d’énergie que les combustibles fossiles. Il pointe également le fait que le nucléaire classique n’a pas d’avenir, puisque les réserves d’uranium ne sont pas plus importantes que celles de combustibles fossiles. Seule la surgénération nucléaire semble viable, voire la fusion nucléaire (dont la faisabilité n’est pas démontrée).
J.-M. Jancovici termine en plaçant les citoyens et les politiques devant leurs responsabilités. Là probabilité importante de futurs désordres mondiaux dus au changement climatique (et à l’épuisement des combustibles fossiles) exige un débat public et des décisions rapides, principalement pour réduire fortement les dépenses énergétiques, développer les énergies renouvelables et, sans doute, utiliser la surgénération nucléaire.
Cet ouvrage, unique en son genre, était nécessaire dans la profusion actuelle de documents et d’arides sur le réchauffement du climat. Son approche scientifique et son interdisciplinarité suscitent l’intérêt du lecteur ; il pose des questions essentielles sur l’avenir de l’humanité et mérite de toucher un public aussi large que possible. Seule critique : il manque un index à ce livre. Il est donc parfois un peu long de retrouver certaines informations précises, d’autant que l’ouvrage, assez touffu, peut les aborder en différents endroits.
Ndlr : cet ouvrage a obtenu le Prix Roberval 2002, dans la catégorie « Prix grand public ».
La Jaune et la Rouge, avril 2003 (Alain Thomazeau)
Ce livre, dont une recension est parue dans La Jaune et la Rouge n° 577 d’août-septembre 2002, a été couronné en décembre 2002 par le prix Roberval, prix intemational créé par l’Université technologique de Compiègne et le Conseil général de l’Oise, dont le but est de « mettre à la portée du grand public francophone l’actualité de la technologie, en contribuant à la réflexion sur ces questions essentielles à l’avenir de nos sociétés ».
Cet ouvrage met en évidence les données scientifiques connues sur l’évolution récente du climat et sur l’effet de serre, analyse les diverses conséquences prévisibles et les diverses causes humaines et se termine par des réflexions personnelles sur les actions possibles. L’une de ses qualités principales est le soin apporté à discuter le pour et le contre, en mettant clairement en évidence la complexité des problèmes et en s’appuyant systématiquement sur des ordres de grandeur – ce qui est malheureusement rare en ce domaine. Ce livre n’a pas d’équivalent malgré la masse de tout ce qui s’écrit sur le sujet.
Le Nouvel Observateur, septembre 2002 (Gérard Petitjean)
A ceux qui n’ont pas le coeur de lire les 800 pages ardues du dernier rapport du GIEC daté de 2001 [NB : faisant l’objet de ma page ici], on recommandera la lecture de « L’Avenir climatique » de Jean-Marc Jancovici, un polytechnicien spécialiste de l’effet de serre (Seuil). Rigoureux et facile à lire.
Revue de l’AFITE (Association Française des Ingénieurs et Techniciens de l’Environnement), septembre 2002 (J. Lebegue)
Un ouvrage remarquable.
Voilà des lustres que l’on nous parle de l’effet de serre et chaque membre de l’AFITE possède au moins les notions de base qui lui permettent de porter leur jugement personnel. Beaucoup d’adhérents sont même très « pointus » sur le sujet.
Mais en réalité tout ceci est fort complexe et, outre le fait qu’il y a lieu de bien connaître les gaz coupables, les données correspondantes recueillies quant au passé et au temps présent, les conventions internationales conclues (ou non), mais aussi les solutions possibles du problème en ce qui concerne les énergies, encore faut-il prendre conscience que des décisions politiques majeures qui nous impliqueront tous vont devoir être prises. Lesquelles ?
Ce livre fournit réponse à ceux qui recherchent des données, qui veulent faire le point quant aux conventions en cours d’établissement (Rio, Kyoto, les différents COP), qui se demandent quelles sont les limites des énergies alternatives, et qui veulent voir énoncer les questions existancielles à se poser (dans quel monde acceptons nous de vivre ?) pour un futur » durable « .
Bref : un livre à avoir dans sa bibliothèque.
L’Humanité Hebdo, 24 août 2002 (Jean-Claude Oliva)
Dans un ensemble « Idées soutenables – livres incontournables ».
Les ouvrages consacrés au changement climatique sont fort nombreux. Parmi les derniers parus, « L’Avenir climatique » offre un exposé complet et didactique de la modification du climat, de ses conséquences possibles, de ses causes probables.
Revue « Naturellement », juillet 2002 (anonyme)
Un livre à lire et à faire lire !
Avec une clarté remarquable, Jean-Marc Jancovici, polytechnicien, expert professionnel passionné des questions environnementales, nous fait découvrir l’effet de serre et les problèmes angoissants qui en découlent.
L’exposé est organisé de façon linéaire, mais en plusieurs parties de façon à permettre au lecteur de commencer la lecture par le thème qui l’intéresse. S’il s’avère que des explications complémentaires sont nécessaires, le numéro de la page où ces explications sont fournies figure sur place… Les explications scientifiques sont rendues accessibles par l’usage d’un vocabulaire simple, de commentaires, de synthèses progressives.
L’ouvrage présente d’abord la façon dont le travail collectif de nombreux scientifiques du monde entier a permis de conclure que l’augmentation actuelle de l’effet de serre est due aux activités humaines. La consommation effrénée des combustibles fossiles, les pratiques agricoles actuelles, certains procédés industriels augmentent la teneur de l’atmosphère en « gaz à effet de serre ». Si ces activités humaines continuent à se développer au rythme actuel, nous aurons dans les décennies qui viennent des conséquences telles que : élévation significative du niveau des océans, modification des courants océaniques, modifications du climat en général, avec les conséquences dramatiques que l’on peut imaginer. Les résultats acquis montrent qu’il faudrait agir dés maintenant bien plus qu’on ne le fait, pour réduire le risque d’avoir une situation catastrophique dés les années 2050.
L’auteur analyse ensuite les données pour chaque activité (agriculture, industrie, transports, etc.). Il examine une à une les propositions d’actions « technologiques » pour produire moins de gaz à effet de serre (que penser des éoliennes? que penser du nucléaire? de la voiture électrique? etc.).
Sur la base des données précédentes (systématiquement accompagnées de calculs d’ordres de grandeur), la conclusion est que seul le passage à une utilisation parcimonieuse (« économique » !) de l’énergie, donc un changement total de mode de vie dans les pays riches, peut conduire à une situation stable. Le « libéralisme économique » qui triomphe actuellement dans le monde entier conduit, de façon parfaitement anarchique (en fait selon « la loi du plus fort est toujours la meilleure »), les pays riches à consommer toujours plus d’énergie et de ressources, de ressources fossiles en particulier, et les pays pauvres à stagner ou régresser. Poursuivre ainsi, c’est aller tout droit à la catastrophe climatique et sociale, humanitaire.
Une liste de décisions gouvernementales françaises récentes montre que le changement de trajectoire n’est guère d’actualité ! Sous le titre « Comment sortir de cette schizophrénie? » l’auteur essaie enfin de proposer une démarche politique démocratique de nature à faire accepter aux citoyens des pays les plus riches une transformation de leur mode de vie frénétique actuel en un mode de vie « soutenable » pour la planète.
La Revue des Entreprises (revue du MEDEF), juillet 2002 (Jean-Luc Gréau)
Si nous ne parvenons pas à ralentir puis à inverser le flux d’émissions de gaz qui produit l’effet de serre, la pérennité de l’humanité pourrait être menacée. La gravité du sujet rend toute autre considération presque secondaire. En effet, les activités humaines sont à la source de l’émission de six gaz différents, dont le gaz carbonique est le plus notable, qui, en s’accumulant dans l’atmosphère, piègent près du sol la chaleur issue du rayonnement solaire. Cet effet, longtemps négligeable, a pris une importance majeure du fait de l’accroissement démographique d’une part et du développement des activités agricoles et industrielles d’autre part.
Les calculs scientifiques montrent que la concentration du principal d’entre eux, le gaz carbonique, suit une courbe exponentielle depuis la fin du deuxième conflit mondial. Le doute n’est pas permis. L’homme a la chance insigne de connaître la concentration de ce gaz durant une très longue période. Les échantillons de l’atmosphère des 400.000 dernières années prélevés dans la calotte glaciaire du Groenland ou de l’Antarctique nous en administrent la preuve.
Mais est-on sûr de la responsabilité de l’homme dans cette situation fâcheuse ? Hélas oui. Le système terrestre naturel fonctionne globalement comme un « puits de carbone ». Ceci signifie que, grâce à l’action des océans, il absorbe plus de gaz qu’il n’en émet. La concentration accrue de gaz ne peut donc provenir que de l’activité humaine. Fait essentiel, qui rend le phénomène réellement grave, le gaz carbonique émis mettra plusieurs siècles à se dissiper spontanément.
Les autres gaz responsables de l’effet de serre, méthane, protoxyde d’azote, ozone, gaz industriels tels que les CFC et les PFC, aux caractéristiques différentes, ne sont guère plus rassurants. Par exemple, les PFC (perfluorocarbures), particulièrement opaques au rayonnement infrarouge, ont des durées de vie qui peuvent aller jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’années.
Le diagnostic est sans appel. Même un arrêt brutal des émissions, proprement inimaginable, n’empêcherait pas la planète de se réchauffer très lentement durant plusieurs siècles. Les scénarios élaborés par le GIEC (Groupe intergouvememental sur l’évolution du climat) donnent une fourchette d’augmentation de la température moyenne allant de 1,5°C à 5,8°C d’ici 2100. Cette augmentation, inégale, sera maximale dans les zones polaires.
Elle accroîtra l’évaporation et, par voie de conséquences, les précipitations. Les différences de pression entre les zones froides et chaudes de la planète s’aggraveront et les risques de tempêtes ou d’ouragans s’intensifieront, même dans les zones habituellement tempérées. L’écosystème est menacé d’altérations profondes : élévation du niveau des mers, prolifération des micro-organismes pathogènes, raréfaction de certaines espèces animales ou végétales.
Qui est responsable ? Une industrie et des transports gourmands en énergies fossile, la culture des céréales et l’élevage bovin, c’est-à-dire précisément ce qui a fait la richesse des pays développés depuis les premières révolutions industrielle et agricole du XVIIè siècle. Tout se passe comme si le savoir scientifique et la capacité économique n’avaient arraché l’homme à son ancienne misère que pour le vouer plus tard à l’étouffement climatique.
Pour parvenir à une situation stabilisée, il faudrait retrouver un seuil d’émission égal à la moitié de celui constaté en 1990. Véritable gageure, quand on sait que non seulement la population croît encore, que les pays pauvres ou émergents n’ont d’autre envie que de copier le modèle des pays riches qui a précisément provoqué l’effet de serre, et que ces derniers pays n’ont pas encore commencé à réduire leurs émissions, à l’exception de l’Allemagne et du Royaume-Uni. Encore faut-il noter que la performance de nos deux voisins n’en est pas une : elle résulte de l’abandon forcé du charbon, champion de l’émission de gaz carbonique. Ils sont encore de plus forts émetteurs que la France relativement favorisée par son recours à l’énergie nucléaire.
Que faire ? Jean-Marc Jancovici demande de ne pas succomber à l’illusion d’une sauvegarde par la technique. Il faudra sans aucun doute recourir massivement et de façon méthodique à tous les moyens offerts ou promis par la science et la technique afin de réduire, pour une production donnée, le montant des émissions. Mais cela ne paraît pas suffisant.
L’énergie solaire, dont l’ère commence avec la réalisation des cellules à couches minces, constitue un substitut d’avenir à l’énergie fossile pour le chauffage ou la production d’électricité domestique, mais demeure limitée par les difficultés de stockage. Malgré Tchernobyl, le nucléaire ne mérite pas l’indignité auquel le voue l’idéologie écologiste : cependant, les réserves en uranium 235 ne dépasseraient pas quelques décennies en cas de recours systématique à l’électricité nucléaire. Il faut donc impérativement changer de mode de vie, consommer moins d’énergie, apprendre à se déplacer moins et moins vite, faire évoluer l’alimentation.
Profondément pessimiste. La lecture du livre de Jean-Marc Jancovici ne peut manquer d’inspirer un pessimisme profond. L’avenir de l’humanité ne sera plus déduit d’une extrapolation de son passé récent. La contrainte exogène de l’effet de serre impose de revoir de fond en comble les conditions du développement, surtout dans la perspective de la mondialisation. A suivre l’auteur, celle-ci ne saurait consister à étendre aux pays pauvres les facilités et les excès des pays riches. Un problème global, aux équations ardues, se présente à l’examen de l’homme. Celui-ci, qui s’était considéré comme un maître de la nature, redevient son élève.
Les perspectives inquiétantes dessinées par l’auteur ne doivent pas nous dissuader de le lire. C’est d’abord un ouvrage pédagogique qui embrasse l’ensemble du problème. Son auteur est parvenu à le rendre accessible à un public sans culture scientifique approfondie. C’est ensuite un livre débarrassé de tout biais idéologique apparent. Il ne s’agit ni de restaurer la société du passé lointain ni d’ouvrir la voie à une nouvelle expérience socialiste, mais seulement de conjurer un péril collectif. L’avenir climatique est un livre écrit pour l’honnête homme du XXle siècle.
M. Hubert Curien, président de l’Académie des Sciences, juin 2002
Votre « Avenir Climatique » est un fort bon ouvrage. Vous êtes précis, mesuré, et déterminé. (…) Avec mes félicitations et mes sincères encouragements.
M. Marcel Gauchet, Directeur de la Rédaction de la revue « Le Débat », juin 2002
Je [vous remercie] de votre livre auquel à ma modeste échelle j’ai fait beaucoup de publicité. Il est vraiment exceptionnellement éclairant.
Mention sur le site de France 3, en marge de l’annonce de l’émission « C’est pas sorcier » du 26 juin 2002
Une synthèse claire des nombreux travaux scientifiques récents en matière de réchauffement de la planète, d’évaluation des risques qui en découlent, et d’identification des activités humaines directement incriminées. Les énergies renouvelables y sont, entre autres, abordées, en tant que solution technique alternative.
Bruxelles en Mouvement, juin 2002 (Philippe Cornélis)
Quelques mois à peine après la sortie de «Effet de Serre – Allons nous changer le climat? », écrit en collaboration avec Hervé Le Treut, Jean-Marc Jancovici remonte au front avec son nouveau livre : « L’avenir climatique ». Et notre impression est à nouveau positive : cet ouvrage est une synthèse très accessible et étonnamment complète de la «question climatique». Comment fonctionne le «Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat » ? Qu’est-ce que l’effet de serre ? Pourquoi le climat se réchauffera-t-il ? Quels sont les impacts possibles de ce réchauffement sur les conditions de vie sur Terre ? Pourquoi est-il urgent d’agir ? Toutes ces questions, et bien d’autres, sont abordées avec une étonnante faculté de vulgarisation et de synthèse, qui rendent la lecture à la fois instructive et légère. La capacité de l’auteur à rendre son sujet extrêmement concret, grâce au recours constant à des exemples tirés de la vie quotidienne, est à nouveau remarquable.
Une petite réserve, cependant. Pour couvrir une matière aussi vaste en moins de 300 pages, l’auteur a été obligé de prendre parfois certains raccourcis. Convaincu à juste titre que la solution au problème climatique ne viendra que d’une réorientation radicale de nos modes de vie, il n’en perd pas moins à notre sens sa partialité dans le débat sur les sources d’énergie. Non que son soutien au nucléaire soit condamnable, même si la grande majorité des gouvernements européens et des mouvements environnementalistes – dont Inter-Environnement Bruxelles – ne le partagent pas. Mais plutôt que l’auteur, très zélé lorsqu’il s’agit de minimiser les possibilités de l’éolien, par exemple, oublie un peu facilement les arguments opposables à la voie nucléaire.
Car si celle-ci présente l’immense avantage de ne pas émettre de CO2, elle n’est pas « propre» – comme on l’a trop souvent entendu récemment- pour autant. Les discussions entre Bush et Poutine pour l’exportation éventuelle des déchets nucléaires américains en Russie en sont un rappel récent. Si vous décidez de lire «L’avenir climatique », il serait donc sans doute bon de jeter un oeil également sur l’article de Stephan Vis (Inter-Environnement Wallonie) paru dans 1’« Echo » du 10 mai : « Cancer nucléaire ou fièvre climatique ?». Vous y apprendrez, entre beaucoup d’autres informations, que le nucléaire ne contribue que pour 10% à la consommation finale d’énergie en Belgique, pourtant le troisième pays le plus nucléarisé au monde. Ce qui relativise fortement le potentiel de cette filière dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques, au regard des risques bien réels qui y sont liés. Surtout quand on sait que, d’après Monsieur Jancovici lui-même, la Belgique devrait réduire de plus de 80% ses émissions de gaz à effet de serre pour s’inscrire dans un scénario vraiment « durable ». Et que le recours à l’énergie nucléaire rime bien souvent avec gaspillage énergétique…
Cette parenthèse refermée, il reste que « L’avenir climatique » est un ouvrage très instructif, que plusieurs constatations et pistes d’actions présentent un grand intérêt, et que nous ne pouvons que vous en conseiller la lecture.
La Recherche, juin 2002
Changement climatique : vérité ou affabulation ? (…) Dans un registre beaucoup plus détaillé mais tout aussi accessible, Jean-Marc Jancovici invite à prendre un peu plus d’altitude sur le sujet. L’écriture est interactive et incisive. Les angles choisis sont inattendus, permettant un récit tour à tour sociologique, économique, technique et scientifique. Un ouvrage qui répond, mais qui questionne également.
M. Jacques Hamon, ancien sous-directeur général de l’Organisation Mondiale de la Santé
Le documentation la plus sérieuse et la plus accessible, en Français, sur ce sujet est présentée par Jean-Marc Jancovici dans « L’avenir climatique ; quel temps ferons nous ? »
L’Expansion, 22 Mai 2002 (anonyme).
Ecologiste sans oeillères
Il veut lutter contre le réchauffement de la planète et il défend le nucléaire. Il rappelle que l’agriculture est le premier émetteur de gaz à effet de serre en France. Il démontre que le moteur électrique n’est pas forcément la réponse à la contribution de l’automobile au réchauffement. Bref, cet ingénieur n’est pas un écolo politiquement correct.
Ciel et Espace, Mai 2002 (A. K.).
Le réchauffement climatique global dû à l’activité humaine a déjà fait couler beaucoup d’encre : les mécanismes de l’effet de serre ont été décortiqués, les signes avant-coureurs identifiés. L’ouvrage de Jean-Marc Jancovici traite des aspects concrets de ce réchauffement et des options politiques (en matière de transports, de choix énergétiques…) qui l’accompagnent.
Il examine de façon pragmatique les différentes solutions – ni utopiques, ni très coûteuses – qui s’offrent aujourd’hui à notre société. Cette « réflexion d’ingénieur sur le changement climatique » donne à tous les citoyens des éléments clés pour comprendre et agir.
Michel Volle, économiste, statisticien, spécialiste des systèmes d’information (mars 2002)
J’avais lu auparavant « l’Effet de serre » que Jancovici a écrit avec Hervé Le Treut. Cet ouvrage présentait un constat. Dans « L’avenir climatique », Jancovici élargit le propos et examine comment l’humanité pourrait éviter le bouleversement climatique de notre planète, son habitat biologique.
C’est un livre sans prétention, raisonnablement complet, courageux, rigoureux. Jean-Marc Jancovici m’avait communiqué quelques « bonnes feuilles » avant la publication. J’aurais dû l’inciter davantage à corriger son français, même si la maladresse de la forme ne gêne pas la lecture et fait parfois un plaisant contraste avec la rigueur du fond.
Jancovici est modeste. Je ne suis pas un scientifique ni un expert, dit-il ; je ne suis qu’un ingénieur dont le métier est de tirer parti de la science existante et qui laisse à d’autres le soin de la faire progresser. Cette attitude n’est pas de mise dans une époque où tant de gens font semblant de comprendre ce qu’ils ignorent (Jacques Bouveresse dit que c’est le cas de la plupart des philosophes qui citent la relation d’incertitude d’Heisenberg ou le théorème de Gödel), où la prétention est très rentable sur les plans politique et médiatique. Elle est toutefois intellectuellement féconde : l’ingénieur soumet les résultats de la science à une épreuve de cohérence à laquelle les spécialistes n’auraient peut-être pas songé, et il en tire des conclusions pratiques qui ne leur seraient sans doute pas venues à l’esprit.
Cette approche permet à Jancovici de présenter la synthèse d’une immense diversité de travaux. Il sait élaguer sans déformer, ce qui lui permet d’être complet sans lourdeur. Fidèle à l’adage selon lequel « la physique, c’est la science de l’approximation », il n’hésite pas à calculer des ordres de grandeur et à tirer les conséquences qualitatives du calcul. Cet effort est méritoire : son texte étant facile à lire, ceux qui manquent d’expérience croiront qu’il a été facile à écrire. La rigueur, ici, réside discrètement dans les choix qu’il a fallu faire pour pouvoir être simple.
Au XVIIIème siècle, l’humanité a commencé à produire de l’énergie en utilisant des carburants fossiles. Cela a facilité la motorisation qui a elle-même permis l’accroissement de la richesse. Mais cela a par ailleurs changé la composition de l’atmosphère. L’augmentation de la proportion de gaz carbonique, en particulier, accroît l’effet de serre et suscite donc un lent réchauffement. Certes aujourd’hui la température n’excède pas encore de façon significative l’ampleur des fluctuations historiques, mais il est très probable que le mécanisme du réchauffement est déjà enclenché. La compilation des modèles de simulation indique la fourchette de l’évolution future et aucun d’eux ne permet d’anticiper un refroidissement.
Le raisonnement est probabiliste. Ceux qui n’ont pas l’habitude de la statistique disent qu’un raisonnement probabiliste ne prouve rien. Pourtant quand un médecin leur dit « si vous ne changez pas votre mode de vie, la probabilité que vous mourriez d’un accident cardio-vasculaire dans les dix prochaines années est de 70 % », cela les décide à faire plus d’exercice et à s’alimenter autrement. Jancovici est comme un médecin de la planète qui dirait : « si nous ne changeons pas notre mode de vie, la probabilité d’une évolution climatique catastrophique dans les décennies à venir est de 99 % ». Qui osera négliger un tel signal ?
Voici les conséquences probables de la hausse prévisible de la température : augmentation de la sécheresse des zones désertiques et de la fréquence des ouragans et tempêtes ; changement des courants océaniques, perturbant la vie marine et la répartition du climat ; hausse du niveau des océans, inondation des régions côtières ; déplacement des zones fertiles (d’où risques de guerre) ; enfin, passé un seuil critique, l’émission dans l’atmosphère du méthane retenu par le permafrost ou le déstockage des écosystèmes rendrait l’accroissement de l’effet de serre irréversible quelles que soient les décisions humaines. La terre irait alors vers un point d’équilibre tout différent : ce ne serait sans doute pas le même que celui de Vénus, avec ses 450°C au sol et ses pluies d’acide sulfurique, mais cela transformerait peut-être assez notre planète pour la rendre inhabitable à terme.
Nous soupçonnions qu’en rejetant ses déchets dans l’air, l’eau et le sol, l’humanité modifiait les conditions de vie des générations futures ; le diagnostic est désormais assez précis pour que l’on puisse établir une prescription. Si l’on veut stabiliser la concentration du gaz carbonique dans l’atmosphère (objectif modeste, car il vaudrait mieux la diminuer), il faudra limiter les émissions annuelles à 50 % du niveau atteint en 1990. Pour une population de 6 milliards d’individus cela représenterait 500 kg d’équivalent carbone par personne*an, soit (en retenant les chiffres de 1998) 10 % des émissions d’un Américain, 25 % des émissions d’un Français, 80 % des émissions d’un Chinois, etc. (pp. 186-188).
L' »American way of life », qui implique une forte consommation d’énergie, ne pourra donc pas se généraliser au monde entier : le mode de vie des pays riches est non un exemple à imiter, mais une anomalie historique et biologique dont la persévérance, la généralisation risqueraient d’être mortelles pour notre espèce. La sobriété, qui relevait auparavant d’un choix esthétique, moral ou intellectuel, devient alors une obligation.
Pour répondre au risque climatique il faut d’une part réduire la consommation d’énergie, d’autre part réviser les procédés techniques de sa production. L’utilisation des combustibles fossiles est à proscrire ; l’énergie hydraulique et le vent offrent des ressources limitées ; la solution pourrait résider dans l’utilisation conjointe de l’énergie solaire et du nucléaire.
Le nucléaire à la rescousse de l’écologie (p. 230) ! Il faut du courage pour énoncer une prescription qui va choquer beaucoup de monde. Jancovici est un écologiste, pas un politicien. Il ne se soucie pas de l’image qu’il donne. Ayant mis le doigt sur un problème qu’il juge capital, il l’appuie. Il n’a rien à voir avec les Verts pour qui la peur du nucléaire est un levier électoral. Certains d’entre eux ne le lui pardonneront pas.
Il termine pourtant par une recommandation politique (p. 275) : celle d’un référendum européen, seul moyen de susciter un débat à la hauteur de l’enjeu, puis de réduire les émissions mondiales de façon significative, enfin d’indiquer la voie au reste du monde. Cette proposition surprend au premier abord mais plus on y réfléchit, plus on la trouve raisonnable. L’ingénieur a ici terminé son travail. Au politique de prendre le relais.
Grégoire Postel-Vinay, chef de l’Observatoire des Stratégies Indutrielles, Ministère de l’Economie et des Finances (mars 2002)
Un des grands problèmes de notre temps, et de l’exercice de la démocratie, est de faire en sorte que les citoyens aient une vision aussi claire que possible d’enjeux techniques dont le décryptage est le plus souvent ardu. Ainsi, l’un de mes professeurs expliquait-il qu’il y a quatre degrés de la connaissance :
- celui de l’élève et de l’étudiant, qui bénéficie du savoir de ses maîtres,
- celui du jeune savant, qui explique un problème à ses pairs,
- celui de l’enseignant exposant un savoir élaboré à un public déjà concerné,
- celui du sage capable d’exprimer en un langage clair ce même savoir, à tous, et de les y intéresser.
C’est aussi ce qui inspirait Pierre Massé, comme l’un des principaux promoteur d’une vision stratégique de l’action publique lorsque, second commissaire au plan, il lançait « il s’agit de fournir la description d’un futur possible suffisamment attractif pour tous et perceptible par chacun pour le rendre collectivement possible », bref, de donner du sens. Et l’éloge qu’André Giraud prononçait sur Pierre Guillaumat commençait ainsi : « Voir loin… »
Telle est donc ta triple ambition, que d’atteindre ce quatrième niveau de connaissance, d’en user pour servir l’intérêt public, et que ce soit sur des enjeux majeurs de très long terme, peu soucieux de ce que les Corses nomment la « policella » ; c’est une noble tâche, et ma foi, le résultat est fort séduisant.
Je souhaite donc à ce livre toute l’attention qu’il mérite, et en remercie l’auteur !