Tribune parue sur le site Nouvel Observateur le 16 mars 2012
NB : ce texte, publié en ligne sur le site du Nouvel Observateur, était initialement un mél envoyé aux journalistes pour lesquels j’ai une adresse électronique. Le texte a été un peu modifié sur le site de l’Obs (et affublé d’un titre et d’un chapô qui sont un peu en décalage avec la conclusion, mais sans gravité).
Chers amis journalistes (motorisés ou pas),
Je viens d’entendre ce matin, sur Europe 1 (zut, j’ai toujours dit pas de noms), un dénommé Michel Sapin (zut, j’avais dit pas de noms) expliquer qu’il faut mettre en place une baisse de la TIPP quand le prix du pétrole monte (idée géniale qu’avait déjà eu Fabius dans un précédent gouvernement qui incluait aussi les Verts, comme quoi nos amis ont de la suite dans les idées).
Pour quiconque sait compter, il s’agit à l’évidence d’une proposition de subvention à la consommation de combustibles fossiles (car baisser les prix par baisse de la fiscalité c’est subventionner). Après avoir dit qu’il fallait sauver la raffinerie de Petit Couronne, je vais finir par croire que ce n’est pas les qatari qui ont acheté le PSG, mais le PS qui a acheté Gazprom et Saudi Aramco :-).
Plus sérieusement, le pétrole est déjà à la baisse pour l’Europe, avec pour conséquence que les prix ne sont pas près de se calmer. Cette proposition aurait donc pour résultat de contribuer à maintenir aussi longtemps que possible une balance commerciale en déficit (70 milliards cette année à cause de l’énergie !), des émissions de CO2 élevées (que la loi oblige à diviser par 4 depuis 2005), et un déficit public croissant pour garantir les recettes à l’exportation des saoudiens, russes, irakiens et nigérians. On peut le souhaiter, mais il faut bien comprendre que l’on achète ainsi une augmentation de la probabilité du scénario grec.
Le même PS explique ensuite à qui veut l’entendre que la part du nucléaire est trop élevée et qu’il faut la faire baisser. Là encore quiconque sait compter comprend que cela signifie soit un recours au charbon et au gaz et plus de CO2 « si ca passe », comme en Allemagne (ce sur quoi la presse française est quasi-muette, ce qui n’honore pas la profession), soit, si ça ne passe pas, le remplacement du nucléaire par… rien hormis 3 éoliennes, avec pour conséquence un accroissement de la récession. J’en déduis que Sapin – parlant pour Hollande ? – souhaite accélérer les récessions et augmenter les émissions de CO2, la fin de l’histoire étant que Marine Le Pen finira par tous les remplacer :-).
Incidemment, Sapin a indiqué ce matin que Sarkozy avait « baissé les bras » devant la situation que nous vivons sur le pétrole, ce qui est amusant – enfin façon de parler – quand on sait que la taxe carbone, qui est LA chose à faire si on ne veut pas « baisser les bras » devant notre dépendance au pétrole, a été annulée par le Conseil constitutionnel suite à un recours… du PS il me semble :-).
Même si c’est probablement le dernier du cadet du quart de la moitié de vos soucis de savoir ce que pense 1/43000000è du corps électoral (et un 1/20000000è de votre audience), c’est-à-dire ma modeste pomme, je dois dire que je suis triste – et surtout inquiet – de voir cette démagogie délétère si mollement contrecarrée par les questions posées aux candidats dans les colonnes de journaux ou sur les plateaux de télévision, qui se contentent trop souvent de passer les plats. C’est dit :-), peut-on espérer enfin des questions qui rentrent dans le dur et des « interviewers » qui n’acceptent pas aussi facilement la réponse hors sujet ou incohérente avec la promesse précédente ?