Tribune parue dans Les Echos du 20 octobre 2015
Il évoquait déjà la fumée noire crachée par les pots d’échappement des camions et bus hors d’âge, et voici désormais qu’il est associé à la tricherie à l’échelle planétaire du premier constructeur automobile européen : le diesel n’a assurément pas le vent en poupe. Que faire alors ? Mais s’en passer, évidemment.
Le diesel, tout le monde le sait, vient du pétrole. De par son processus de formation, ce dernier contient des chaines carbonées très diverses, qui seront séparées au raffinage. Mais toutes les raffineries au monde produisent inexorablement du GPL, du naphta (qui sert de matière première pour la pétrochimie), de l’essence, du kérosène, du fioul ou diesel (c’est le même produit), du fioul lourd, et des huiles, graisses et bitumes.
Avec le temps, ce ne sont pas les mêmes produits qui ont eu la faveur des utilisateurs. Il y a un siècle et demi, seuls le kérosène (pour l’éclairage) et les huiles et graisses (pour les machines à vapeur) intéressaient les consommateurs. A cette époque, il n’y avait pas de moteur à combustion interne, et on jetait l’essence dans les rivières ! Aujourd’hui, 20% à 35% du pétrole traité fournit du diesel, selon sa provenance et les caractéristiques de la raffinerie, joujou à quelques milliards de dollars pièce qui ne peut être reconfiguré du jour au lendemain comme on tourne un thermostat.
Si le diesel ne va plus dans les voitures, on peut envisager, alors, d’augmenter le chauffage au fioul ou le nombre de camions au diesel qui circulent. Pas sûr que ce soit ce que les adversaires de ce carburant ont en tête ! Et pas sûr que ce soit la meilleure option pour lutter contre le réchauffement climatique…
Une autre manière de consommer moins de diesel – et donc de baisser la pollution et les émissions de CO2 afférentes – est tout simplement de diminuer la consommation moyenne des voitures en circulation, sans viser l’éradication d’un carburant particulier. Il suffirait pour cela que la consommation affichée par les constructeurs corresponde à une utilisation en conditions réelles, et non à des résultats de tests qui sont conçus uniquement pour produire des valeurs artificiellement basses. Le consommateur y gagnerait la vérité des chiffres, le pays une baisse de consommation de pétrole importé et d’émissions diverses, et l’état éviterait de payer des bonus sur des bases fausses.
Cadeau bonus : quelques graphiques à l’appui de l’article
Vous trouverez ci-dessous quelques graphiques non publiés avec l’article, mais utiles pour comprendre certaines affirmations.
Décomposition par catégorie des produits pétroliers consommés en Amérique du Nord en 2014.
Light distillates = naphta, essence.
Middle distillates = kérosène, diesel ou fioul.
Fuel oil = fioul lourd pour marine marchande.
Others = GPL, solvants, huiles, graisses, bitumes, coke de pétrole.
Données : BP Statistical Review 2015.
Décomposition par catégorie des produits pétroliers consommés en Europe en 2014.
Données : BP Statistical Review 2015.
Décomposition par catégorie des produits pétroliers consommés en Asie en 2014.
Données : BP Statistical Review 2015.
Décomposition par catégorie des produits pétroliers consommés dans le monde en 2014.
(Ce sont donc, par la force des choses, ce que produisent les raffineries dans le monde en moyenne).
Données : BP Statistical Review 2015.