Tribune parue dans Les Echos du 19 septembre 2017
Les habitants de Saint Martin, de Cuba, de Houston, mais aussi les Indiens assistant à la mousson du siècle et les Canadiens voyant partir leur forêt en fumée, songent peut-être, en ce moment, et avec amertume, à ce dicton que nous avons tous entendu (souvent avec exaspération) dans la bouche de ceux qui ont déjà vécu les ennuis : mieux vaut prévenir que guérir.
Ce dicton, les entreprises feraient bien de le méditer aussi en matière de « risque climat ». Les signaux se multiplient qui devraient inciter les dirigeants du monde économique à comprendre la dépendance de leur chaine de valeur aux émissions de gaz à effet de serre, et sa vulnérabilité physique face aux conséquences possibles du changement climatique. Quelques exemples récents seront sûrement évoqués dans le cadre de la Climate Week qui démarre à New-York : l’article 173 de la loi de transition énergétique en France, les recommandations de la Task Force on Climate-related Financial Disclosures présidée par Michael Bloomberg, ou la pression exercée par certains fonds d’investissements et gestionnaires d’actifs, BlackRock et Vanguard en tête.
Les combustibles fossiles ayant permis l’avènement de la civilisation industrielle, l’agriculture productive, et le passage de l’humanité de 0,5 à 7 milliards d’hommes, s’en passer, même progressivement, représente un défi titanesque. En pareil cas, il y a deux options. La première est d’appliquer la vieille maxime de Queuille (« il n’est de problème qu’une absence durable de solution ne finisse par résoudre »), réaction malheureusement inopérante à terme quand on se bat contre la physique, mais de loin la plus largement répandue aujourd’hui.
La deuxième, indispensable pour commencer à avancer, et que certains actionnaires commencent à réclamer parfois, est de repenser en conséquence la stratégie et la politique produits, la logistique et les RH, la supply chain et les rémunérations, et, surtout, commencer par se doter des tableaux de bord et outils de contrôle de gestion permettant de comprendre ce que l’on fait et pourquoi on le fait. Pas de navigation sans boussole !
Le faire coutera de l’argent, évidemment. Ne pas le faire en coutera considérablement plus, avec possiblement la honte en prime, dans pas si longtemps que ca.