Tribune parue dans Les Echos du 19 mars 2019
En 1992, à Rio, le Sommet de la Terre créait la Convention Cadre des Nations Unies sur le changement climatique. Adopté par tous les pays du monde, le texte indiquait que les signataires étaient « Résolus à préserver le système climatique pour les générations présentes et futures ». Le CO2 occupait alors 0,0355% du volume de l’atmosphère, ce que l’on présente plus couramment sous la forme de « 355 parties par million » (ou 355 ppm).
Depuis, nous avons fait des réunions des pays signataires de cette convention climat, certaines qualifiées de succès (Kyoto en 1997, Paris en 2015), d’autres d’échecs (Copenhague en 2009), et beaucoup de « petits pas dans la bonne direction ».
Nous avons créé des directions du développement durable, fait des rapports éponymes, juré craché par terre que nous allions verdir tout ce que nous faisons, et fait force scénarios montrant que nous pouvions découpler activités économiques et émissions grâce au progrès technique.
Mais la concentration en CO2 ne semble pas s’en être rendue compte, puisqu’elle a inexorablement – et très régulièrement – augmenté d’environ 2 ppm par an, exactement comme avant la convention climat et les rapports développement durable ; elle vient de dépasser 410 ppm pour la première fois début 2019. Nous n’avons donc pas « fait un peu » : nous n’avons rien fait du tout.
Mais la France est bonne élève sur ses émissions domestiques, non ? C’est parfaitement exact, grâce à une électricité nucléaire qui est un atout indéniable et dont il est incompréhensible que le gouvernement la voie en ennemie et pas en alliée. Mais il reste transports, industrie, chauffage et agriculture, et surtout nous importons de plus en plus de biens de nos pays fournisseurs, « made in fossile » comme partout.
Résultat : l’empreinte carbone de la France – toutes les émissions de fabrication de ce nous consommons, qu’elles aient eu lieu chez nous ou ailleurs – a augmenté de 25% depuis 1990. Parlez moi de décarbonation !
Et depuis 1992, les « générations futures » sont devenues… nos enfants. Ce sont eux qui manifestent dans la rue en nous demandant des comptes. Si nous étions à leur place, penserions nous légitime de respecter ceux qui ont été à ce point parjures ?
Cadeau bonus : quelques graphiques à l’appui de cet article
Vous trouverez ci-dessous quelques graphiques non publiés avec l’article, mais utiles pour comprendre certaines affirmations.
Emissions de CO2 fossile depuis 1750. Les accords démarrés en 1992, ne semblent pas avoir significativement infléchi quoi que ce soit…
Source du graphique : GIEC, 5è rapport d’évaluation
Concentration atmosphérique de CO2 au moment de chaque réunion des pays signataires (les fameuses COP, pour Conference Of the Parties) de la Convention Climat. La COP 1 a eu lieu en 1995 à… Berlin ! Le ministre allemand de l’environnement à l’époque s’appelait… Angela Merkel, la même qui en 2011 donnera la priorité à la sortie du nucléaire sur la sortie du charbon en Allemagne.
La COP 3 est celle de Kyoto, Copenhague est la COP 15, Paris la COP 21.
On voit sur ce graphique que la concentration augmente régulièrement, sans aucun lien avec le fait que la COP soit qualifiée de succès ou d’échec, et sans aucun lien avec les déclarations des acteurs (entreprises, états) sur les mesures entreprises. Hélas…
Source des données pour la concentration : GISS NASA