Tribune parue dans Les Echos du 2 juin 2015
A Copenhague, en 2009, les négociations climat ont fait naître un chiffre désormais emblématique pour l’avenir : 2°C. C’est, au vu de notre connaissance du passé, le réchauffement global à ne pas dépasser pour éviter un avenir que nous trouverions bien trop amer.
Or, la physique et la chimie nous disent que le climat de 2100 ne dépendra, au premier ordre, que de la quantité totale de gaz à effet de serre que les hommes auront envoyée dans l’atmosphère entre 1850 et 2100. Pour respecter les 2°C, nos émissions à venir ne doivent pas dépasser la moitié de ce que nous avons déjà émis depuis 1850.
La suite relève des mathématiques de Terminale : si le cumul est limité à 1,5 fois les émissions passées, alors nos émissions annuelles doivent commencer à baisser dans les années à venir, être ramenées au tiers de leur valeur actuelle en 2050, devenir nulles vers 2080, et négatives (par le stockage de CO2) à la fin du siècle.
Passons à la pratique. Avec environ 1.500 GW (l’équivalent de 1500 réacteurs nucléaires) de centrales à charbon et 800 GW de centrales à gaz dans le monde, l’électricité pèse 25% des émissions mondiales. Nous avons 50 ans – pas plus – pour tout remplacer par nucléaire et ENR, les secondes demandant parfois 10 à 40 fois plus de capital que le premier pour le même résultat.
La planète compte plus d’un milliard d’engins roulants, volants et naviguant (15% des émissions) : 2°C supposent ne rien vendre d’autre, dès demain ou presque, que des voitures à 1 ou 2 litres aux 100, des camions à 10 litres, et des bateaux à voile ou nucléaires. L’industrie pèse 15 % du total, les 4/5è venant des matériaux de base (métallurgie, chimie, ciment, papier…). Même avec des trésors d’ingéniosité, les tonnages actuels ne peuvent se maintenir : vive l’économie circulaire !
L’agriculture représente près de 30% des émissions, le bétail étant directement ou indirectement à l’origine de l’essentiel : il faudra manger moins de grosses bêtes. Enfin, nous avons plus d’une centaine de milliards de mètres carrés de logements et bureaux de par le monde : tout rénover demande environ une année de PIB mondial. Tout cela est possible, et même souhaitable. Mais combien de dirigeants ont compris que c’était cela, l’économie des 2°C ?