Le célèbre champion du monde de vélo sur piste Robert Förstemann pédale contre un grille-pain 700W !
Pour tous les individus plongés dans l’énergie au quotidien, le kWh est aussi familier, en apparence, que le litre d’eau l’est au jardinier ou le kg de farine au boulanger. Pourtant, sur le fond, personne ne sait vraiment ce que représente un kWh, pas même moi ! L’énergie, cela ne se touche pas, c’est juste un chiffre abstrait sur un bout de papier, quelques fois le préalable à une facture, et pour en appréhender la signification, il faudra toujours – on n’échappe pas à ses sens – mettre en face d’une consommation une action du monde physique qui l’illustre de manière parlante pour tous.
Il est donc très difficile, avec des kWh, ou des tonnes équivalent pétrole et autres gigajoules (sans parler des quadrillions de British Thermal Units de nos amis anglo-saxons), de faire comprendre combien notre consommation d’énergie – celle de chacun d’entre nous, et pas seulement du conducteur de 4×4 (et, de plus en plus souvent, de la conductrice !) – est devenue totalement « hors normes » par rapport à ce qu’a toujours été la condition de l’humanité.
Pour la bonne cause, il va falloir faire quelque chose que la morale réprouve hautement : je vais me permettre de réintroduire l’esclavage, pour comparer l’énergie déployée par les machines qui nous entourent et celle utlisée par nos propres organismes. En effet, l’homme, comme toute « machine », consomme de l’énergie, qu’il(elle) va transformer ensuite – avec un très mauvais rendement, comme nous allons le voir – en énergie mécanique, et bien sûr aussi en énergie thermique. L’homme transforme aussi, ce que l’on ne peut oublier, l’énergie qu’il consomme en organisation de l’information, mais ceci est une autre histoire.
L’homme, combien de kWh ?
En fait, l’unité d’énergie que chacun d’entre nous connaît le mieux n’est pas le kWh, mais probablement… la Calorie. En effet, presque chacun d’entre nous sait (et surtout les femmes quelques mois avant l’été en lisant leur magazine préféré) qu’une personne sédentaire a besoin d’environ 2.000 Calories par jour, qui nous sont fournies par notre alimentation. Ces Calories ne représentent rien d’autre que le contenu énergétique extractible de ce que nous mangeons, et notre corps en fera bien sûr le meilleur usage (y compris la confection de poignées d’amour), sauf quand quelque vendeur de régimes minceur nous persuade du contraire.
Puisque c’est de l’énergie dont il est question, il est donc possible de convertir nos 2.000 Calories en kWh, qui est une autre unité de mesure de l’énergie, et qui est applicable à toute forme d’énergie, et pas seulement à l’électricité. Une petite règle de trois (1 Calorie (avec un C majuscule) = 1.000 calories (avec un c minuscule) = 4,18 kilojoules, et 1 kWh = 3,6 megajoule) permet de déboucher sur la conclusion qu’un homme (ou une femme, pardon !) au repos absorbe environ 2,3 kWh par jour.
Dit autrement, le métabolisme de base d’un homme (ou d’une femme, re-pardon !) absorbe 0,1 kWh par heure, dont l’essentiel (et même la totalité, quand nous sommes immobiles) retourne dans l’environnement sous forme de chaleur (c’est bien la peine de se donner tant de mal à faire des petits plats raffinés pour que nous transformions tout cela comme une vulgaire ampoule !). La puissance absorbée par un corps au repos est celle d’une bonne ampoule de 100 watts, et c’est la raison pour laquelle les salles de réunion chauffent quand elles sont très remplies : à 100 watts par actionnaire, une assemblée générale chauffe au sens propre avant de chauffer au sens figuré.
Revenons maintenant à nos esclaves (fictifs, bien sûr), pour voir combien il en faudrait à notre service, à chacun d’entre nous, pour que nous bénéficions du même niveau de confort qu’avec les machines et l’énergie « moderne ». Tout le monde, malheureusement, n’aura peut-être pas la chance d’avoir Zidane ou Diagana à son service, dont les corps peuvent restituer de l’ordre du kW mécanique en plein effort, et il nous faudra peut-être nous contenter d’un esclave « ordinaire » comme moi, dont le corps peut consommer environ 1000 watts pendant quelques heures si je suis bien entraîné (avec une restitution sous forme mécanique de 200 watts seulement).
Si mon esclave turbine violemment 10 heures par jour, avec une puissance moyenne absorbée pendant l’effort de 500 watts (elle sera nécessairement inférieure à ce qu’un organisme absorbe sur une durée plus restreinte) il aura consommé 5 kWh (soit 500 watts x 10 heures), et les 14 heures restantes, comme il sera au repos parce que je suis un bon maître, il consommera les 100 watts mentionnés plus haut, pour un total de 1,4 kWh (soit 100 watts x 14 heures). Total de la journée : 6,4 kWh (soit environ 5.000 calories absorbées).
Si nous supposons que notre esclave est une femme, ne consommant que 400 watts en plein effort, et autorisée à ne travailler que 8 heures par jour (sauf si l’égalité des femmes commande ici aussi !), l’énergie consommée sur la journée se limitera à 4,8 kWh, et si nous avons un travailleur qui n’est pas de force (lavage du linge, cuisine, ou que sais-je), ne consommant que 250 watts en activité, mais 12 heures par jour, c’est 4,2 kWh sur 24 heures qui seront engloutis par son organisme. En première approximation, un être humain effectuant un travail très « physique » consomme donc de l’ordre de 5 kWh par jour.
C’est là que nous commençons à mesurer le « saut de puissance » fantastique qui est arrivé à notre espèce en domestiquant les énergies fossiles : avec 1 euro, je m’achète 1 litre d’essence, qui contient 10 kWh d’énergie (à peu près), soit l’équivalent de la consommation de 2 « esclaves » pendant une journée complète. Et le pétrole vaudrait cher ?
Le prix ridiculissime du pétrole apparaît encore plus si nous basons notre calcul non point sur l’énergie consommée par un homme, mais sur l’énergie mécanique qu’il peut restituer. Imaginons un manoeuvre qui creuse un grand trou, et va donc charrier des pelletées de terre toute la journée. Si notre homme (c’est rarement une femme, pour le coup) remonte une pelletée de terre de 3 kg toutes les 5 secondes, il aura remonté environ 17 tonnes en 8 heures de travail (c’est en fait un total considérable ; essayez et vous verrez !). Si cette remontée se fait sur 1 mètre de hauteur, la belle formule de physique que tous ceux (et celles) qui n’ont pas trop dormi près du radiateur ont gardé en mémoire (E = mgh) permet de dire que l’énergie mécanique correspondant à ce travail vaut…. un peu moins de 180.000 joules, c’est-à-dire un ridicule 0,05 kWh ! Si notre homme a absorbé 5 kWh dans la journée pour soutenir ce régime de travail de force, nous voyons que le rendement purement mécanique de la machine humaine est de l’ordre de 1%. Abracadabrantesque !
Mais ce rendement peut être encore plus faible : si les bras sont utilisés pour boucher des bouteilles, par exemple, l’énergie mécanique obtenue à la fin de la journée sera probablement inférieure d’un facteur 10 à 50 à celle mise en mouvement par un ouvrier qui creuse un trou (et ca sera encore moins si les bras servent… à taper sur un clavier).
Le rendement des jambes, toutefois, est meilleur que celui des bras : si le même manœuvre, pesant 70 kg « tout nu », a grimpé 2000 mètres de dénivelée dans la montagne, avec 30 kg sur le dos (les connaisseurs apprécieront), il aura fourni un travail de (70+30)*2000*9,81 = 2 mégajoules, soit 0,5 kWh en chiffres ronds. Dans ce cas, le rendement fait un bond astronomique, puisqu’il passe à quasiment 10%.
Dans le même temps, un moteur à explosion a un rendement de l’ordre de 20% à 40%, c’est-à-dire que je récupère sous forme d’énergie mécanique 20% à 40% de l’énergie thermique contenu dans le carburant de départ. 1 litre d’essence, consommé dans un tel moteur, produira donc 2 à 4 kWh d’énergie mécanique. Si c’est uniquement le côté mécanique de l’esclave au travail qui nous intéresse, alors nous voyons qu’avec le litre d’essence précédemment mentionné, et ses 2 à 4 kWh de travail mécanique une fois passé dans un moteur, nous avons l’équivalent de 100 (grosses) paires de bras pendant 24 heures à 0,05 kWh pièce, ou de 10 (grosses) paires de jambes sur la même durée. Et le pétrole serait cher (bis) ?
Il est bien évident, quand on voit cette astronomique différence de prix entre l’énergie humaine et l’énergie fossile, que tout ce qui peut être confié à une machine le sera si c’est le raisonnement purement économique qui est le critère déterminant. Heureusement, ce n’est pas toujours le cas, et heureusement aussi, rare est le travailleur qui ne fournit que de la force mécanique, sans le moindre soupçon d’intelligence (qui elle vaut plus cher) et d’aptitude à gérer l’imprévu (qui elle vaut considérablement plus cher chez la machine que chez l’homme).
Combien d’esclaves dans la vie moderne ?
Maintenant que nous savons qu’un être humain au travail consomme de l’ordre de 4 à 5 kWh par jour, et restitue 0,05 (voire moins) à 0,5 kWh d’énergie mécanique sur la même période, nous pouvons convertir à peu près toute consommation d’énergie de la vie qui est devenue courante en « équivalent esclave », ce qui revient à dire combien nous avons d’esclaves fictifs à notre service à travers la consommation d’énergie liée à ceci ou cela. Vous n’avez pas peur du vertige ? Alors c’est parti…
En l’an 2012, un Français consomme environ 30 000 kWh d’énergie finale par an toutes énergies et tous usages confondus (environ 50 000 kWh par an en énergie primaire), mais hors importations (car ces dernières « contiennent » l’énergie utilisée ailleurs pour un bien ou service que nous consommons chez nous).
Consommation d’énergie finale par usage en kWh par Français en 2011.
L’ensemble représente environ 30.000 kWh. « matière première » désigne les hydrocarbures qui ne sont pas brûlés mais utilisés comme matière première par la chimie pour fabriquer des produits divers (plastiques, lessives…).
Source : Commissariat Général au Développement Durable, 2012
Nous allons maintenant jouer à l’esclavagiste (en tout bien tout honneur, quand même…) en convertissant ces consommations d’énergie en « équivalent esclave ». Le principe sera le suivant :
- pour les usages thermiques de l’énergie, nous utiliserons comme équivalence un homme = 2,5 kWh par jour (il fournit donc son métabolisme de base), soit 876 kWh par an,
- pour les usages mécaniques de l’énergie, cela dépend :
- si le service rendu est assimilable à de la « force brute », sans que la précision du geste ne soit déterminante (la montée d’une charge sur un chantier, par exemple), nous imaginerons que ce sont uniquement des jambes qui le fournissent, et que notre esclave fournit 0,5 kWh par jour sur 2/3 des jours de l’année (il se repose un peu quand même !),
- si le service rendu demande de la précision (par exemple un assemblage mécanique de pièces d’un objet), nous imaginerons que ce sont uniquement des bras qui le fournissent, et que notre esclave fournit 0,02 kWh par jour en ne se reposant qu’une journée sur 10 (la puissance de référence est plus faible par jour travaillé que pour charrier de la terre, car cette dernière activité n’est pas vraiment « de précision »),
Sur ces bases nous allons prendre des hypothèses de conversion simple (simpliste ?) selon les secteurs consommateurs d’énergie.
- le secteur agricole de notre pays utilise beaucoup de pétrole, et un peu d’électricité.
Consommation d’énergie du secteur agricole en France depuis 1970, en millions de tonnes équivalent pétrole
(une tonne équivalent pétrole = 11600 kWh).
Source : Commissariat Général au Développement Durable, 2012
Nous allons supposer que le pétrole sert à faire fonctionner des moteurs à 20% de rendement, qui substituent un peu des jambes (labour), mais surtout du travail « de précision » (semis, épandage de phytosanitaires, cueillette de céréales et légumes, travail de la vigne, etc) qui substitue des bras.
L’électricité, quant à elle, est supposée faire fonctionner des machines « de précision » (machines à traire, trieuses, etc) mais aussi de l’éclairage (par exemple pour les élevages) et du chauffage. Pour refléter tout cela nous prenons l’hypothèse que 30% seulement de l’énergie consommée par le secteur est convertie en mouvement (70% est de la chaleur perdue dans les moteurs des tracteurs), et que dans cette énergie 20% vient remplacer des bras (semis, récolte, traite, etc) et 10% des jambes (labour….). Le besoin en chaleur (séchoirs par exemple) est négligé.
- L’industrie utilise un peu de tout.
Consommation d’énergie du secteur industriel en France depuis 1970.
Source : Commissariat Général au Développement Durable, 2012
Nous allons supposer que gaz et charbon ne servent que pour la chaleur, que le pétrole sert pour faire tourner des moteurs à 20% de rendement, et que l’électricité est essentiellement utilisée pour produire du mouvement (machines tournantes, ponts élévateurs, convoyeurs, robots industriels, compresseurs, pompes…). Cela donne donc 50% de l’énergie qui sert à fournir de la chaleur, 80% de 15% qui est perdue (chaleur fatale dans les moteurs à pétrole), et pour la fraction mécanique (environ 35%), nous allons supposer que les 2/3 viennent substituer des jambes et 1/3 des bras.
- le résidentiel-tertiaire (le tertiaire est l’ensemble de ce qui n’est ni industriel ni agricole : commerces, écoles, hopitaux, bureaux, prisons, etc) utilise un peu de tout, mais en premier lieu de l’électricité
Consommation d’énergie du secteur résidentiel-tertiaire en France depuis 1970.
Source : Commissariat Général au Développement Durable, 2012
Nous allons supposer que gaz, pétrole et ENR thermiques ne servent qu’au chauffage (et à l’eau chaude sanitaire), et que les 2/3 de l’électricité ont des usages thermiques (chauffage, eau chaude, plaques de cuisson, fours, chaleur perdue de l’éclairage, chauffage de l’eau des machines à laver et des lave-vaisselle, etc). Pour le 1/3 restant de l’électricité, nous allons supposer que les 3/4 remplacent des bras (parce que imprimer du papier, laver une assiette ou une chaussette, enlever de la poussière ou transmettre une information sont loin de correspondre à de la seule puissance brute), et 1/4 seulement des jambes (ascenseurs, par exemple).
- Enfin les transports ne consomment quasiment que du pétrole !
Consommation d’énergie des transports en France depuis 1970.
Source : Commissariat Général au Développement Durable, 2012
Pour le coup, cela va être simple : 80% de l’ensemble est de la chaleur perdue, et 20% du mouvement qui vient remplacer des jambes.
Résultat des courses : notre consommation moderne d’énergie met à notre disposition l’équivalent de … plus de 400 esclaves par Français !
« Equivalent esclaves » (fictifs, bien sûr !) liés à la consommation d’énergie par usage, sur les bases détaillées ci-dessus.
Un Français a l’équivalent de 400 à 500 esclaves à sa disposition 24 heures sur 24 ! (sans compter les importations, qui en rajoutent pas loin de 100). Ce résultat serait le même, en ordre de grandeur, pour l’essentiel des européens.
En bref, aujourd’hui, l’énergie mécanique ne vaut pas cher, elle ne vaut rien, et son abondance a fait du plus minable des Occidentaux un nabab au regard de ce qu’étaient les conditions matérielles d’un « Français moyen » du 19è siècle. Qui avait les moyens, avant que charbon, pétrole et gaz – et marginalement le reste – n’envahissent nos vies, se se payer avec le seul fruit de son travail « normal » l’équivalent de cinq cent domestiques pour se déplacer, se nourrir, se divertir, faire sa cuisine et sa vaisselle, et j’en passe, ce qui est maintenant la condition de M(me). « tout le monde » ? Le roi, et encore !
Si nous détaillons un tout petit peu le graphique ci-dessus, voici quelques commentaires :
- Pour produire la nourriture aujourd’hui consommée par les français, il faudrait une population agricole de… 1,8 milliards de personnes (pour 65 millions de français) si nous avions le même régime alimentaire et pas d’énergie fossile ou fissile. Bien sûr, les conventions choisies peuvent se discuter, il est possible qu’il suffise de 500 millions (!!).
Il n’empêche : on voit ici que l’énergie a pour premier effet de permettre à l’essentiel de la population active de faire autre chose que de l’agriculture, et cela se retrouve si l’on regarde, pour l’ensemble des pays du monde, comment évolue la part de la population active en fonction de la consommation d’énergie par personne.
Part de la population active dans l’agriculture (axe vertical, en %) en fonction de la consommation d’énergie par personne (axe horizontal, en tonnes équivalent pétrole) pour tous les pays du monde pour lesquelles les deux données sont disponibles.
La courbe noire donne la tendance d’ensemble.
NB : les pays pour lesquels les données ne sont pas disponibles sont des pays « pauvres », qui seraient de toutes façons avec une consommation d’énergie par personne très faible, et essentiellement des agriculteurs dans la population active.
Source des données Banque Mondiale, 2013.
Une conclusion dérivée de ce qui précède est que manger du bifteck-frites à tous les repas n’est pas possible sans énergie abondante, car il faut une production végétale très importante pour nourrir les animaux que nous mangerons ensuite.
- Le résultat pour l’industrie est dans l’ordre des ratios que l’on observe à chaque fois que l’énergie passe par là. Par exemple un mineur avec sa pelle et sa pioche extrait 100 fois moins de minerai ou de charbon par jour qu’un mineur… qui est devenu un conducteur d’engin de chantier (excavateur, dumper, bulldozer, etc) dans une mine industrialisée. De même, avec une grue de chantier un homme peut hisser 100 fois plus de poids par jour que s’il le portait à dos d’homme (les tours de la Défense seraient un peu plus longues à construire en pareil cas….). Nous avons donc tous 200 ouvriers à notre service – sous forme de machines d’usines alimentées à l’énergie – qui fabriquent nos vêtements, assiettes, tables, lunettes, voitures, fenêtres, télévisions, et même les barbecues et les raquettes de plage !
- Pour les transports, le résultat peut sembler faible en comparaison du reste, mais il ne faut pas oublier que les moyens de transport sont utilisés très peu d’heures par an : de l’ordre de 200 heures pour une voiture (alors que j’ai imaginé que mes esclaves travaillent en permanence). La plus modeste Twingo, avec ses 42 kW de puissance (soit environ 60 CV), tracte autant que 90 cyclistes de compétition en train de pédaler comme des forcenés (et plus près de 500 cyclistes comme moi !). Si mes esclaves n’étaient sollicités qu’au moment du déplacement, ce n’est donc pas 20 qu’il m’en faudrait, mais plutôt 10 fois plus.Un autre parallèle peut être utilisé : sachant qu’un cheval de puissance (environ 0,7 kW) représente réellement un cheval attelé en termes de puissance de traction, cela signifie que le moindre smicard, aujourd’hui, a les moyens de se payer un attelage de 60 chevaux pour le prix de 6 à 8 mois de salaire. Et l’énergie vaudrait cher (bis ou ter) ? Même une pétrolette de 50 cm³, avec ses 2 ou 3 kW de puissance de moteur, représente déjà l’équivalent de 15 à 20 êtres humains en train de pédaler…
- Enfin pour le résidentiel-tertiaire, nous voyons à quel point l’électroménager, l’électronique et l’informatique, et les innombrables appareils électriques fournissant des services très divers (lampes, pompes, ascenseurs, volets roulants, horloges…) représentent autant de domestiques quasi-gratuits cachés un peu partout !
La conclusion de cette affaire est évidemment indicible en démocratie : ce n’est pas seulement le mode de vie de M. Dassault ou de la Reine d’Angleterre qui est devenu « non durable » si nous nous mettons sur le terrain de la physique, mais bien celui de chacun(e) d’entre nous, ouvrier(e)s d’usine, agents de nettoyage et caissier(e)s de supermarché compris.
L’effort à fournir pour que notre espèce adopte un mode de vie « durable » (au sens de : pouvant être perpétué plusieurs siècles au moins sans implosion du système) ne peut être mis exclusivement sur les épaules des gros bourgeois : avec plus de 7 milliards d’hommes sur terre, et surtout plus d’un milliard d’Occidentaux, les « modestes » des pays industrialisés – une partie de la Chine comprise – devront s’y mettre également, car eux aussi contribuent déjà à dépasser les possibilités physiques de la planète.
Il y a quand même une bonne nouvelle : une division de l’énergie fossile consommée par 4 dans l’Hexagone, ce qui est nécessaire pour régler le problème climatique, signifie encore, à technologie constante, une bonne centaine « d’équivalent esclave » par Français. Ce ne serait pas vraiment le retour à l’âge de pierre, contrairement aux affirmations de certains !