GALAM Serge, Les scientifiques ont perdu le Nord, éditions Plon, 2008
(200 pages, 21€)
Commentaire
La recette est désormais éprouvée : pour faire un livre qui présente un contrepoint contre le « consensus mal né des climatologues », prenez un individu qui n’a pas directement publié des articles scientifiques sur la question de l’influence de l’homme sur le climat (même s’il est scientifique), parsemez l’ouvrage de quelques vérités bien senties que tout un chacun est capable de comprendre (le climat ce n’est pas simple, prévoir l’avenir est un exercice périlleux, nous nous sommes déjà trompés de par le passé et regardez tous les exemples, certains militants écolo exagèrent – ce qui est parfaitement vrai – etc), et vous êtes en pole position pour faire alors avaler la série de mensonges, approximations, amalgames, extrapolations invalides et autres simplifications abusives sur le travail et les conclusions des scientifiques qui contribuent à alimenter le dossier de l’influence de l’homme sur le climat.
N’oubliez pas d’agiter le chiffon rouge de la collusion et du complot, ce qui permettra à l’auteur d’apparaître tel James Bond ou Charles de Gaulle, visionnaire seul contre presque tous dans ce monde de moutons décervelés ou de scientifiques maléfiques à peu près aussi sains d’esprits que les alchimistes de jadis terrés dans un trou à rat en poursuivant leur rêve impossible, et roule ma poule, vous terminerez chez Guillaume Durand ou Frédéric Taddéi (ce qui est probablement encore plus facile si vous êtes édité chez Plon, qui, outre Galam, édite Allègre ; l’attaché(e) de presse doit commencer à avoir un discours rodé).
N’oubliez pas de réserver vos éventuels efforts de pédagogie à l’explication de phénomènes hors sujet pour ensuite faire l’impasse sur les limites de la validité de la comparaison, et de rajouter à la confusion dans les accusations en usant généreusement du « on », qui permet opportunément de faire dire n’importe quoi à n’importe qui (« on, pronom canaille », dit la maxime : quand vous voyez une phrase qui comporte le pronom « on », posez vous immédiatement la question : « qui est on ? », et souvent vous comprendrez que l’auteur lui-même n’en sait rien ou que les propos sont attribuables à d’autres personnes que celles visées), et des articles définis, nécessairement faux (« les scientifiques », ce sont tous les scientifiques ; comment l’auteur peut-il être sûr de ce que pensent tous les représentants d’une catégorie qu’il est en outre incapable de définir précisément ? Pourquoi ne pas dire « certains représentants de telle discipline », ou mieux encore « Mr. X ou Mme Y » ?).
Comme le maître incontesté de cette catégorie d’imposteurs à grande gueule, j’ai nommé Claude Allègre, Galam ne procède pas différemment : il nous explique combien il est brillant dans son domaine (il explique p. 77 et 78 qu’il a prévu le non au référendum sur le traité constitutionnel européen), mais comme Allègre il amalgame joyeusement tout et son contraire, ment, et surtout se trompe de cible : c’est la traduction médiatique de la science qui devrait être au cœur de sa critique, et non l’information d’origine que, pour l’essentiel, il ne connaît pas. Si l’auteur avait fait son autocritique, le titre n’aurait pas été très différent, il suffisait de le mettre au singulier !
Comme d’habitude, Galam se trompe de cible : les éléments de la distorsion engendrée par le téléphone arabe qui va de a science à sa traduction dans le débat grand public ne sont pas avant tout dus aux scientifiques, mais aux militants, élus, et surtout à la presse, condamnée à la simplification même quand elle essaie de bien faire, sur laquelle notre ami, probablement très pressé de se faire inviter sur un plateau de télévision (comme tous les « sceptiques »), se garde bien d’émettre la moindre critique alors qu’elle est à l’origine de la quasi-totalité des amalgames ou transpositions simplistes qu’il critique dans son livre.
Au lieu de faire l’imposteur, Galam aurait mieux fait d’utiliser sa verve pour expliquer comment les débats scientifiques sont rapportés de manière nécessairement simplifiée par les médias, et combien ces derniers ont parfois la polémique dans le sang. Mais il est vrai que s’il s’était contenté d’énoncer, de bonne foi, des vérités tranquilles, comme des milliers d’enseignants qui font sereinement leur métier, et au surplus en soulignant les limites de l’exercice qui consiste à inviter du monde sur un plateau de télé ou dans des conférences, il n’est pas du tout sûr qu’il aurait pu causer dans le poste ! Du reste notre ami aime tant la presse que plus de 50% des références mises en notes de bas de page de son livre sont des articles de journaux ou des textes pris sur des sites internet de médias, donc des textes qui n’ont aucune valeur probante dans un débat scientifique (ce qui figure dans le journal n’engage que le journal ; personne ne peut jamais savoir si les faits rapportés sont justes, représentatifs, etc). Au moment où cette page a été rédigée, la page personnelle de Galam sur le site de son labo mentionnait abondamment ses interventions dans la presse généraliste, ce qui est peu courant pour un chercheur en sciences dures. Ah, le pouvoir fascinant du miroir aux alouettes…
Florilège
Comme pour Allègre, je vous propose quelques extraits du livre de Galam avec commentaires derrière, pour expliquer ce qui motive le commentaire général ci-dessus.
« à 90% le réchauffement climatique serait du aux nuisances humaines, chiffre arrêté par les plus hautes instances internationales qui, dans la foulée, affirment que 90% c’est comme 100% »
(page 9, autant commencer très fort !).
Suit une longue logorrhée partant en guerre contre l’expression « nuisances humaines » (ou « culpabilité humaine ») dont le livre est parsemé à intervalles réguliers, ainsi que contre ces pourcentages que Galam a sortis de leur contexte, et sur lesquels il revient aussi de manière incessante dans son pamphlet (le chapitre 8 y est intégralement consacré, par exemple p. 75 il est écrit :
« Il est remarquable de se souvenir de la façon dont cette certitude de la culpabilité humaine a progressé depuis les premiers rapports du GIEC. En 1990, il était simplement noté qu’il y avait du réchauffement. Cinq ans plus tard, en 1995, il déclare que l’homme est coupable à 50%. Encore six ans, en 2001, et la culpabilité humaine monte à 66%. Et après un nouvel intervalle de six ans, en 2007, elle atteint les 90% (…). On se demande pourquoi pas 100% ? Combien d’années encore pour combler ce vide des 10% ? »).
- Aucune publication scientifique que j’ai lue à ce jour ne parle de « nuisances humaines » ou de « culpabilité humaine » quand il est question de l’influence de l’homme sur le climat ; Galam a donc beau jeu de répondre à une affirmation que pas un physicien de moi connu n’a écrit dans un article scientifique (mais rappelez vous qu’une règle d’or dans ce genre de livre est d’inventer des choses que votre « adversaire » n’a jamais dites, c’est quand même drôlement plus commode pour critiquer ensuite !),
- Galam s’enflamme contre une présentation probabiliste de l’impact humain sur l’évolution climatique récente, alors que l’événement vécu est unique. Formellement, il a raison, sauf que… il a tort quand même. Formellement il a raison, bien sur : nous n’allons pas jouer à modifier le climat planétaire 478 fois, en injectant 478 fois des gaz à effet de serre dans l’atmosphère de manière différente de 1850 à 2100 pour regarder comment évoluent les choses, en remettant le compteur à zéro après chaque expérience (cette impossibilité est même longuement évoquée dans Le Plein s’il vous plait). Là où il a tort, c’est que cette approche « simili-probabiliste » correspond bien à la situation concrète où nous devons décider combien miser au 701è jeté de dés – sur lequel nous misons tout – après avoir jeté les dés 700 fois. A ce moment nous nous inspirons du passé pour orienter notre décision future, et cette décision porte sur un événement irréversible. C’est bien ainsi que doivent être pris ces « simili-probabilités » qui apparaissent dans le résumé pour décideurs du rapport du GIEC. Elles sont destinées à donner une traduction quantitative, formellement inapplicable à une approche probabiliste, mais dont on saisit bien le sens, pour désigner le degré de confiance que l’on peut associer à une conclusion (en l’espèce le fait que l’homme ait déjà imprimé sa marque sur l’évolution climatique des dernières décennies). L’expression initiale employée dans le rapport du GIEC est que, avec un très haut degré de confiance (« very high confidence« ) l’homme a déjà changé le climat de manière discernable au cours de la 2è moitié du 20è siècle, et c’est ce « très haut degré de confiance » qui a été vulgarisé, dans le résumé pour décideurs, sous l’expression « probable à 90% », par analogie avec les cas de figures où ce sont des vraies probabilités qui fondent le pari que nous devons faire. Cette traduction semble légitime dans un document destiné à parler aux décideurs (qui le plus souvent ne se souviennent plus de leurs cours de probabilités, quand ils en ont eu un !). Au lieu de partir en guerre, sur des pages ou des dizaines de pages, contre une vulgarisation éventuellement un peu maladroite mais qui respecte l’esprit de la conclusion, Galam aurait fait oeuvre plus utile en expliquant simplement en quoi l’utilisation des probabilités était formellement fausse mais pédagogiquement juste…
- C’est quoi « les plus hautes instances internationales » ? C’est qui ? C’est quand ? (ne vous fatiguez pas à chercher : l’auteur lui-même n’en sait rien, puisque ces instances n’existent pas)
- Galam utilise à jet continu l’expression « le réchauffement climatique », en utilisant un article défini – « le » réchauffement climatique – comme s’il n’y en avait eu qu’un seul dans l’histoire du climat, ce qui est évidemment une chose qu’aucun scientifique orthodoxe n’affirme ! Et donc, de quel réchauffement climatique parle-t-il ? Celui qui a eu lieu il y a 25 millions d’années, au milieu de l’Oligocène ? Celui qui a culminé il y a 50 millions d’années ? Celui qui a eu lieu de 1970 à 2010 ? Celui qui nous attend pour le 21è siècle ? Il est important de savoir que l’essentiel des « sceptiques » confondent les deux derniers en permanence, et c’est le cas aussi chez Galam.
- Si Galam vise le réchauffement récent, qui a eu lieu depuis 1970, il faut savoir que la nature supposée de ses causes fait l’objet d’un chapitre de 80 pages dans le dernier rapport du GIEC. Il est évident que Galam n’a pas lu ce rapport, et quand bien même il l’aurait fait il est strictement incapable d’en contester le contenu dans les règles (en publiant des articles scientifiques contestant les faits rapportés), car cela suppose d’avoir une connaissance d’expert sur de très nombreux domaines, des algorithmes pour filtrer les données dans les analyses de cernes d’arbres à l’étalonnage des spectromètres de masse, en passant par l’analyse des données satellite sur les profils verticaux de température de l’atmosphère ou encore la corrélation entre activité solaire et taux de Beryllium 10 dans la glace…
« Je persiste et signe pour dénoncer cet amalgame des climatologues entre science, politique et passion »
(page 10).
Galam, comme Allègre, reprend à son compte le titre de « climatologue » qui est une invention de journaliste. S’il désigne juste les scientifiques, il devrait savoir qu’aucune des disciplines scientifiques mise à contribution pour tenter de nous éclairer sur les conditions que connaîtra l’humanité dans 50 ou 100 ans ne porte le titre de « climatologie ». Ensuite, qui est à l’origine de l’amalgame, quand il existe, entre science et politique ? Les scientifiques ? Les politiques ? Les journalistes ? Les militants ? Les journalistes qui citent les militants qui invoquent les scientifiques de travers ? Galam est-il sur qu’en dirigeant sa vindicte contre la science il ne se trompe pas de cible, et qu’il ne ferait pas mieux de critiquer les journalistes qui l’invitent sur les plateaux de télévision ?
« Une grande réunion internationale sur le climat venait de se terminer au siège de l’UNESCO à Paris et avait rendu un verdict sans appel sur la culpabilité de l’homme dans le réchauffement climatique, qualifié de « crime contre la nature ». »
(page 14).
Les déclarations de l’UNESCO n’engagent que l’UNESCO, pas la science, et en plus il est fort probable que l’ami Galam n’ait eu accès qu’à une traduction médiatique de ce que l’UNESCO a vraiment dit. Il juge donc la science sur la base d’une information rapportée par un téléphone arabe à au moins 4 personnes – et probablement plus – dont les maillons successifs sont : le scientifique – le journaliste qui traduit le scientifique en article lu par l’employé de l’UNESCO – l’employé de l’UNESCO – le journaliste qui rapporte ce qu’il a compris de la conférence de l’UNESCO), et 3 seulement si Galam était dans la salle ; le propos est donc totalement inutilisable pour critiquer la science !
« Le sujet du réchauffement climatique est devenu omniprésent à tous les niveaux de la société avec sa litanie de catastrophes annoncées : soit nous continuons notre course effrenée à la consommation, et c’est la fin du monde ; soit nous décidons de vivre dans la frugalité et le partage, et nous serons sauvés. C’est ce que nous entendons partout (…). »
(page 17).
- « ce que nous entendons partout », ce n’est pas « ce que X, qui est océanographe ou dynamicien de l’atmosphère ou glaciologue, a écrit dans tel article publié dans Nature à telle date », mais « ce que j’ai lu dans le journal ou entendu à la radio, ou entendu chez mon voisin ». Tout cela n’engage que le journal, ou le voisin, mais pas les auteurs scientifiques,
- C’est quoi « la fin du monde » ? La fin des hommes ? Le début des ennuis et si oui lequel ? Une baisse de l’espérance de vie de 5 ans ? Pour un amoureux de la précision dans sa discipline, notre ami se pose là !
- « sa litanie de catastrophes annoncées » : la littérature scientifique n’utilise à peu près jamais le terme de « catastrophe ». Quand il est question d’un risque, ce dernier est décrit avec le maximum de précision possible, justement pour éviter des conclusions confuses donc inexploitables.
« Face aux sautes d’humeur parfois dévastatrices du climat et devant l’urgence d’approfondir nos recherches, les climatologues surgissent hors de leur laboratoire pour investir les instances internationales et les media de toutes natures. Au lieu de s’atteler à la tâche avec humilité en mettant en garde contre toute conclusion hâtive, ils assurent qu’ils savent désormais lire dans les méandres du ciel pourtant très couvert. Grâce à leurs ordinateurs, ils nous abreuvent de leur vérité sur la fin du monde tout en nous traçant la voie du salut. Le disque dur a parlé » (p 19). Aie aie aie ! Que de bile déversée en quelques phrases ! Que de mensonges en si peu de lignes ! Que d’hôpital se moquant de la charité !
- Savoir quelle est « l’urgence d’approfondir nos recherches », il vaudrait mieux qu’il en juge après avoir lu la totalité de la production scientifique se rapportant à la recherche en question (celle de l’influence de l’homme sur le climat), soit des dizaines de milliers de pages, ou à la rigueur le rapport complet du GIEC (2400 pages), ce qu’il n’a évidemment pas fait. Au passage, on appréciera tout le sel du « nos » pour désigner ce qui fait l’objet de sa critique pendant 100 pages….
- « Les climatologues », c’est une invention de journaliste (l’enseignement est un long rabâchage !). Qui exactement surgit hors de son laboratoire ?
- « ils assurent qu’ils savent désormais lire dans les méandres du ciel » : ce propos digne d’un album d’Astérix (Le Devin pour être précis) laisse penser que l’évolution du climat est réductible à l’évolution de l’atmosphère. C’est un mensonge grossier, que Galam n’aurait pas beaucoup de peine à rectifier s’il se donnait la peine de se documenter avant d’éructer, puisqu’il y a un labo compétent – le sien ne l’est pas – la porte à côté du sien à l’Ecole Polytechnique. Evidemment, si, au lieu d’écrire implicitement que Hervé Le Treut ou Vincent Cassé (les directeurs successifs du labo en question) sont des escrocs, il allait déjeuner avec eux pour leur demander de bonne foi comment fonctionne toute cette affaire, il ne pourrait plus écrire ces âneries qui allèchent tant les médias et le font exister…
- J’ai dit médias ? J’ai une confidence à vous faire : quand un organisateur d’émission de « débat » cherche des invités pour participer à son émission, s’il veut une version « ring de boxe » et non « salle de classe » (dans cette dernière version il n’y a que des invités compétents sur le sujet, donc pas de polémistes incompétents mais grandes gueules) il va donc contacter à la fois des gens comme Allègre ou Galam et des gens comme Hervé Le Treut ou Jean Jouzel. Ces derniers, une fois sur deux quand ce n’est pas plus, ne seront pas libres (ils ont un cours, un colloque, une commission, etc). Les « sceptiques », au contraire, seront disponibles 9 fois sur 10 (et Allègre dans le quart d’heure, m’a-t-on dit à France Info). Alors, quand Galam indique que les scientifiques orthodoxes ne pensent qu’à se précipiter devant les journalistes, il n’y a pas un petit relent d’hôpital et de charité ?
- « grâce à leurs ordinateurs » : Galam, lui, évidemment, travaille avec juste un crayon et une feuille de papier quand il s’agit de modéliser le comportement des électeurs, ce qui a en plus une force probante bien supérieure à la modélisation des équations de la thermodynamique ! Et je vous fais grâce du commentaire sur « le disque dur a parlé », qui est à mettre dans la catégorie « propos de comptoir après une nuit très arrosée »….
« Puissants dans leur nouvelle posture de prophètes apocalyptiques, forts de leurs certitudes prétendument scientifiques, ils clament haut et fort qu’ils ont identifié la cause du problème. De surcroît, ils nous rassurent en disant qu’ils ont la solution et, simultanément, nous menacent en nous prévenant que si nous ne les écoutons pas, nous serons réduits en poussières par les forces déchaînées de la nature se vengeant des coups mortels que nous lui aurons portés. (…) Les climatologues, nouveaux prophètes, nous réconcilient avec la « science » ainsi révélée par la climatologie écologiste »
(p. 20)
Ces morceaux choisis d’une logorrhée parfois violente qui occupe des pages et des pages (on retrouve des affirmations voisines une à plusieurs fois par page de la page 22 à la page 38), sur le thème des scientifiques qui seraient devenus un clergé d’un nouveau genre, traitant les hommes de « coupables » et annonçant l’apocalypse, et de ce fait totalement sortis de leur domaine de légitimité (la science doit comprendre le monde, non dicter des actes ; tout le monde est évidemment d’accord) prouve essentiellement que notre ami n’a rien lu des articles scientifiques produits par les chercheurs qu’il appelle des « climatologues ». Cette affirmation ne peut prospérer auprès du lecteur qui n’a pas plus lu que Galam la production scientifique en question, ou qui n’est pas capable de la comprendre (ce qui fait évidemment l’essentiel de la population française, et l’essentiel des journalistes de ce pays). Celui qui s’est donné cette peine (de lire la production scientifique) et qui est de bonne foi se tapera un grand coup sur les cuisses ou prendra un coup de sang, c’est selon.
Question, au fait : que fait Galam ? Il travaille dans un laboratoire d’épistémologie. L’épistémologie, quesséça ? C’est la discipline qui « étudie de manière critique la méthode scientifique, les formes logiques et modes d’inférence utilisés en science, de même que les principes, concepts fondamentaux, théories et résultats des diverses sciences, et ce, afin de déterminer leur origine logique, leur valeur et leur portée objective« . En clair, c’est la discipline qui s’occupe d’évaluer les processus utilisés par la science. Galam devrait donc être le plus rigoureux des auteurs, précisant soigneusement de quoi il parle, se défiant des propos confus ou imprécis comme de la peste, ne commettant aucune faute de logique, puisque c’est son métier d’évaluer cela chez les autres. Son livre prouve au moins que l’arroseur arrosé est un sujet éternel !
NB : je suis allé un peu vite dans une interview faite pour le Journal du Dimanche en qualifiant Galam de « mathématicien qui ne connaît rien en physique ou biochimie« , et j’ai assurément dit une demi-bêtise à cette occasion précise. Le mauvais point pour moi est que Galam est physicien, au sens où il a un doctorat en physique et a travaillé dans des disciplines diverses de la physique théorique (physique du solide). Le bon point quand même est que son métier actuel ressemble assez fort à celui d’un mathématicien, puisque Galam travaille sur la formation de l’opinion qu’il étudie avec… des modèles (la bonne blague !). Sur sa page il se présente comme un « théoricien du chaos« , et du coup peut-être que son objectif est de créer du désordre dans le débat public sur le climat pour pouvoir mieux l’étudier ensuite ?
Mais son domaine de recherche ne lui donne pas de légitimité particulière pour critiquer les travaux de ses collègues physiciens sur les modèles de flux de la glace antarctique, la production de carbone 14 au cours du temps dans la haute atmosphère sous l’effet du rayonnement cosmique, les variations lentes de l’insolation à 65°N sous l’effet de l’attraction de Jupiter et Saturne sur la Terre, ou la mesure de l’argon 40 dans les bulles d’air de la glace du carottage de Vostok, en Antarctique (toutes choses – et des centaines d’autres – qui sont nécessaires pour comprendre l’influence de l’homme sur le climat). Par contre sa formation – et sa fonction, il est payé par nos impôts pour amener de la valeur ajoutée à la société, pas pour fiche le pastis dans un débat majeur – le mettrait tout à fait en position de faire de la vulgarisation, c’est-à-dire de lire, comprendre, et traduire en « français ordinaire » les travaux de ses collègues. Son comportement est donc particulièrement mal venu…
« (…) en extrapolant des données très limitées pour prétendre à une parfaite compréhension des dérèglements climatiques actuels, [la climatologie] produit l’illusion d’une démarche scientifique devenue quasi mystique. »
(page 21).
Encore un remarquable condensé de confusion en une seule phrase :
- la climatologie n’existe pas,
- de ce fait elle ne peut rien prétendre…
- l’extrapolation des « données très limitées pour prétendre à une parfaite compréhension », ce sont des dizaines de milliers de pages de publications scientifiques sur lesquelles notre ami s’assoit allègrement (un comportement allègre est un must dans le domaine de la contestation infondée !), résumées en 800 pages dans un rapport publié tous les 4 à 5 ans, ce dont il se rendrait compte s’il voulait bien commencer par lire la production de ses collègues avant de les insulter.
« Pour ma part, je n’apporte pas de preuves scientifiques à tout ce que j’avance et je n’ai pas à le faire. Je dis que le scénario des climatologues n’est pas prouvé scientifiquement. »
(page 29).
C’est pas beau, ça ? En face ils doivent prouver, mais si moi je les traite collectivement de menteurs, j’ai une dispense ! Et dire que cet homme est chercheur dans l’école qui m’a formé… ce n’est probablement pas l’élément le plus noble à mettre à son actif (de mon école). En outre :
- L’expression « le scénario des climatologues » laisse penser qu’il n’y a qu’un seul scénario possible pour l’avenir, ce qui est bien évidemment faux, ne serait-ce que parce que le comportement des hommes ne se réduit pas à une seule possibilité, et bien sûr parce que, à nouveau, « les climatologues » cela n’existe pas…
- Comment peut-on « prouver scientifiquement » un scénario, quand un scénario est souvent une hypothèse par définition ?!?!?
« De plus, des résultats scientifiques encore partiels ont relativisé certaines affirmations des climatologues et en ont mis d’autres en cause. »
(p. 30).
Plus vague que cette affirmation – qui n’est suivie d’aucune précision – tu meurs ! Voici typiquement le genre de phrase remarquablement perverse, parce que, sans offrir la moindre prise à la réfutation (faute d’argument critiqué, difficile de répondre) elle permet quand même d’orienter l’avis du lecteur, dans un sens négatif envers les physiciens du climat, évidemment. Précisons que ni les phrases précédentes ni les phrases suivantes ne permettent de savoir quelles sont les affirmations qui ont été « relativisées », les scientifiques concernés, les résultats qui sont venus jeter le trouble, ou un quelconque indice qui permette de comprendre quel est l’objet du débat. Tout dans la forme, rien dans le fond….
« (…) il est essentiel de valider si le label de certitude scientifique s’applique effectivement à la théorie anti-CO2 humain »
(page 40).
Galam invente là une expression qui ne figure dans aucun article scientifique : la « théorie anti-CO2 humain ». Dès lors, il peut bien s’exciter tout seul et nous expliquer qu’il n’y a pas de certitude dans cette théorie (ce qu’il fait), puisque cette théorie n’existe pas ! Y a-t-il une théorie « anti-vols en avions » à l’oeuvre quand des experts alertent sur un défaut présent sur un nouveau modèle d’avion ? Y-a-t-il une théorie « anti-alimentation » quand des médecins soulignent qu’il vaut mieux ne pas manger trop de sucre ? De même, il n’y a aucune théorie « anti-CO2 humain » quand des physiciens expliquent comment le climat pourrait répondre à un surplus de CO2 dans l’atmosphère. Ils soulignent un ensemble de risques (dont certains sont potentiellement majeurs au vu des comparaisons avec le passé), c’est tout….
« Le caractère scientifique de l’affirmation de la culpabilité humaine dans le réchauffement climatique, contenue dans le fameux rapport du GIEC (…) devient douteux dès lors qu’on y insiste fortement sur le nombre impressionnant de scientifiques – 2500 – qui l’ont signé. »
(page 41).
« (…) Einstein aurait dit que des milliers de signatures n’étaient pas nécessaires pour invalider sa théorie, qu’il suffisait d’un seul argument, mais scientifique. (…). On en revient à l’absurdité scientifique des 2500 signatures du GIEC. »
(page 63).
- Galam argumente comme si le rapport du GIEC était une pétition ! Je vais lasser à force de me répéter, mais ça serait quand même mieux s’il commençait par lire ce qu’il critique, cela lui éviterait d’être ridicule… Bien évidemment, les 2500 (qui ne sont que 500 pour le groupe 1) signataires de ce document (de 800 pages pour le groupe 1 ; de 2400 pages en tout) ne rédigent et ne signent pas tous le même morceau du rapport, tout comme les différents journalistes d’une rédaction rédigent et signent des articles différents. Chaque auteur ou groupe d’auteur est un charge d’un petit morceau de l’ensemble, et par ailleurs les 2500 noms regroupent l’ensemble des auteurs et des relecteurs. Un relecteur n’a pas pour fonction d’endosser la totalité du rapport, mais seulement de relire et commenter la partie qui concerne son domaine de spécialité. Présenter ce rapport comme une pétition ne prouve encore une fois qu’une seule chose : que Galam se limite à une lecture journalistique de la science. Pour un épistémologue, c’est pas terrible….
- Le rapport du GIEC ne contient nulle part le mot de « culpabilité » (mais Galam ne peut pas le savoir puisqu’il ne l’a pas lu). Cette affirmation mensongère – que les scientifiques nous voient tous comme des coupables – revient à de multiples reprises dans le livre de Galam, qui voit décidément la science (sauf la sienne, évidemment) comme une bande de Philippulus déjantés, misanthropes et fanatiques. Que cette homme travaille dans un laboratoire d’épistémologie (c’est à dire un laboratoire qui étudie la manière de travailler des scientifiques) est décidément très curieux avec le jugement qu’il a sur le travail de ses collègues… ou alors il passe ses journées à jouer au baby-foot ?
- dans le « on y insiste fortement », qui est on ?
« on apprend ainsi que les quelques climatologues sceptiques qui résistent au fort courant du moment sont mis à l’écart et privés de moyens pour développer leurs recherches »
(page 43).
« Ceux des climatologues qui voudraient attribuer le réchauffement climatique à une cause naturelle sont systématiquement mis à l’écart de nombreuses activités institutionnelles »
(page 81).
La théorie du complot, c’est comme les figures imposées au patinage artistique, il faut absolument en passer par là dans un ouvrage « contestataire ». Galam s’y plie donc, obligé ! Comme exemple de courageux francs-tireurs il nous ressort des placards les noms qui circulaient déjà il y a des années, et qui ont contribué eux aussi à semer la confusion dans le débat public en surfant sur la propension de la presse à mettre en avant les contrepoints sans se poser plus de questions que cela.
Cela commence par Lomborg, un statisticien qui n’a jamais rien publié sur le climat dans une revue scientifique, mais qui a réussi un coup de génie en vendant 100.000 ouvrages d’un livre basé sur des extrapolations invalides, et Allègre, évidemment porté aux nues pour son courage à résister à la pensée unique (qui est surtout une aptitude à profiter de l’ignorance des journalistes qu’il a en face de lui, et qui ne réfléchissent pas plus loin que cela à la portée de leur acte avant de l’inviter). Le seul mystère avec Allègre est de savoir pourquoi, tant qu’à être contre la pensée unique, il n’a pas encore affirmé que la Terre était plate…
« N’oublions pas que les membres du GIEC sont payés pour défendre la nécessité d’une action coordonnée dans la lutte contre le réchauffement climatique »
(page 45).
En l’espèce, il vaudrait mieux l’oublier, cette phrase, car tout y est faux ou presque.
- Le GIEC n’a pas de membres (ce n’est pas une association à laquelle adhère qui veut….). C’est une agence qui a un mandat, un bureau d’une trentaine de scientifiques, un secrétariat de 10 personnes environ, et qui a pour activité essentielle de produire tous les 4 à 5 ans des volumineux rapports présentant l’état des connaissances en matière d’influence de l’homme sur le climat (avec les certitudes et les doutes), qui comportent quelques milliers de contributeurs ou relecteurs.
- Les auteurs et relecteurs des rapports du GIEC ne sont pas payés en plus pour ce travail (ce sont des chercheurs qui font cela dans le cadre de leur travail).
- Le GIEC n’a pas dans son mandat de défendre une action particulière. Il a dans son mandat de faire un constat sur l’état des connaissances en matière d’influence de l’homme sur le climat (et le constat fait 1600 pages). Le GIEC a donc uniquement pour mandat d’éclairer la décision qui sera prise, ou pas, par ceux à qui elle incombe naturellement (les politiques et autres « décideurs »). Il est probable que Galam confonde le GIEC et la Convention Climat ; pour quelqu’un qui fait la leçon, ça fait désordre…
« La climatologie non seulement n’est pas une science exacte, mais n’est pas une science tout court, du moins pas encore. (…) elle n’a accès ni à l’expérimentation, ni à la répétition d’événements identiques, ou alors seulement sur des échelles de temps de l’ordre de la centaine d’années. (…) La climatologie deviendra une science lorsqu’un nombre suffisant de ses prédictions auront été testées avec succès »
(pages 49 et 50).
Ces phrases, sont suivies par une longue digression (jusqu’à la page 64) d’où il ressort que, dans le cadre de cette tirade, ce que Galam appelle « la climatologie » est probablement « l’emploi des modèles numériques pour établir des conclusions sur l’évolution du climat futur ». On retrouve alors dans les accusations de Galam les vieilles rengaines « anti-modèles » bien connues, comme quoi la vraie vie c’est compliqué ma bonne dame et que on ne voit pas comment 3 professeurs Tournesol tapis derrière leur clavier pourraient en percer les mystères, et autres affirmations de comptoir de bistrot qui sont toujours surprenantes quand elles sont avancées par un individu sensé étudier avant de conclure.
Passons à nouveau sur le fait que Galam ne connaît manifestement de ces modèles que ce qu’il a lu dans le journal ou à peu près, lacune qu’il lui aurait été facile de combler en allant pousser la porte de son voisin de campus, à savoir Hervé Le Treut, au lieu de calomnier ce dernier – p 142 – sur la base de déclarations relevées dans la presse.
- la compréhension du fonctionnement du climat et des impacts d’un changement donne lieu à des expérimentations, certes sur des processus partiels, évidemment, mais l’expérience fait aussi partie de la démarche. Par exemple des biologistes cherchent à recréer, dans de grands aquariums, les conditions d’un océan qui s’acidifient ; des forestiers cherchent à tester, dans des conditions climatiques variées, la capacité de résistance des arbres ; EDF sait recréer, dans de grands halls, les conditions d’un orage pour tester ses installations, par contre il est évident que personne ne sait jouer avec une véritable terre expérimentale qui évoluerait avec des conditions que nous serions seuls à décider.
- L’utilisation des modèles numériques répond justement à cette contrainte : face à la difficulté pratique de jouer avec une vraie terre, la solution est de construire une terre virtuelle sur ordinateur, exactement comme un simulateur d’avion reproduit le comportement d’un avion véritable (et la conséquence n’est pas que les pilotes mettent les avions dans les arbres à leur première prise de commandes), un simulateur de moteur le comportement d’un moteur véritable (et la conséquence n’est pas que les voitures ne fonctionnent pas), etc. Ces modèles ont donné lieu à pléthore d’expérimentations, puisqu’ils sont faits pour cela ; cette expérimentation commence toujours par la confrontation de l’évolution historique avec la simulation du modèle,
- un certain nombre d’événements identiques ou quasi sont étudiés dans le comportement du climat, avec des pas de temps bien inférieurs au siècle (par exemple les précipitations, la formation de la banquise, la grêle, les alizés, etc),
- Sa charge contre les modèles utilisés par les physiciens du climat est d’autant plus étonnante que dans sa discipline, la « sociophysique », il y a aussi des modèles, dont Galam reconnaît (p. §60) que « Ils ne sont pas la réalité, mais un éclairage de la réalité« . Alors pourquoi cette cécité délibérée dans une discipline qui est celle de son voisin de palier ? Il est jaloux, aigri, ou tombé amoureux de Guillaume Durand ?
« Aujourd’hui l’électricité est devenue omniprésente dans la vie des humains, en particulier avec les téléphones portables, les ordinateurs et les baladeurs ».
(page 65).
Les exemples donnés par Galam sont surprenants, parce que ils sont totalement anecdotiques dans la consommation totale d’électricité en France : un téléphone portable ou un ordinateur portable c’est environ 15 kWh par an (et un baladeur encore moins), à mettre en face d’une consommation moyenne par Français et par an de 8000 kWh tous usages confondus, industrie comprise…
« Alors, qu’on ne vienne pas me dire que les climatologues ont compris le climat, un domaine bien plus complexe et global que la supraconductivité. » (page 73).
C’est évident mon cher Watson : si je ne suis pas capable de donner le tiercé dans l’ordre, alors qu’un cheval qui court c’est quand même plus simple que le fonctionnement du système planétaire, d’où voulez vous que je donne le tiercé climatique dans l’ordre ? Plus sérieusement, je ne vois pas bien en quoi la supraconductivité intervient dans la compréhension de la dérive climatique sous l’effet d’un surplus de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Comme on aurait dit dans mon jeune temps, aucun rapport avec la choucroute…
« L’homme a été déclaré coupable simplement parce que pour l’heure on n’a pas trouvé d’autre coupable et aussi parce que les apparences sont contre lui. »
(page 83).
C’est sûr : les centaines de milliers de pages de publications scientifiques sur la question sont nulles et non avenues. Galam n’a pas lu le rapport d’enquête, mais sait qu’il est vide ; il n’a pas lu l’annuaire de Paris, mais il sait qu’il ne trouvera personne s’appelant Dupont ; il n’a pas lu les spécifications de l’avion, mais il sait qu’il ne volera pas ; il n’a pas lu les oeuvre complètes de Malthus, mais il a un avis sur les conclusions de ce dernier, bref il est tellement pénétré, peut-être à cause de sa discipline qui traite de la formation de l’opinion, que le fait brut ne compte pas et seule compte la manière dont l’information se diffuse, qu’il balaie d’un revers de la main tout ce qui a été accompli par ses collègues qui bien évidemment sont des crétins alcooliques et des invertébrés du bulbe. Le dossier est vide, et tous les scientifiques qui ont conclu dans le sens inverse depuis un siècle et demi sont des abrutis ou des malhonnêtes ! Heureusement que le ridicule ne tue pas, et que d’aucuns éditeurs sont prêts à publier n’importe quelle crétinerie pour survivre….
« Les problèmes économiques qui s’annoncent – famine, épidémie, énergie – rajoutant la haine à la haine et les guerres civiles au désordre. Et nous perdons notre temps à regarder le ciel s’assombrir, des lunettes noires sur le nez et notre écran total. »
(page 86).
A nouveau, aie aie aie !
- Je ne savais pas que la famine et l’épidémie étaient des problèmes économiques (que ces problèmes soient souvent pour partie la conséquence de problèmes économiques, c’est certain, mais c’est une autre histoire)
- La première phrase n’a pas de verbe conjugué, mais c’est peut-être une coquille ou un effet de style.
- La deuxième phrase représente une erreur de raisonnement classique : confondre la qualité du raisonnement pour définir un problème avec la qualité du raisonnement dans l’esprit des décideurs. Serge Galam a tout a fait le droit de considérer que, le problème du changement climatique ayant été correctement défini, il s’avère qu’il n’est pas le plus urgent sur la liste des malheurs du monde. Mais cette position ne dispense pas de correctement définir le problème. Dit autrement, au motif qu’il y aurait des problèmes plus urgents à gérer que le changement climatique, alors la science à l’oeuvre derrière la définition de ce dernier deviendrait invalide. C’est évidemment faux.
« (…) à la lumière des dérives de structures existantes comme le GIEC, sans même en citer d’autres plus caricaturales, on ne peut que douter de l’intérêt [d’observatoires placés sous l’égide de l’ONU]. Ces créations supranationales ont une fâcheuse tendance à devenir des instruments d’extrémismes en tous genre. Il faudrait que ces observatoires soient intégrés dans le cadre universitaire (…). »
(page 118).
Y’a bon, par ici la bonne soupe ! Virez-moi tous ces bons à rien de fonctionnaires internationaux qui travailleraient presque pour Al-Quaida ou pour l’église de la Scientologie, au sein de ces agences onusiennes malfaisantes qu’il s’est dispensé de citer, alors que j’aurais bien aimé, moi. Qu’aurait-il trouvé ? L’Organisation Mondiale de la Santé ? L’UNICEF ? Le Programme des Nations Unies pour le Développement ? L’Agence Internationale de l’Energie Atomique ? La FAO ? J’aurais aussi bien aimé qu’il explicite ses attaques contre le GIEC, ce qui aurait permis de lui répondre factuellement (ce qui n’aurait peut-être pas fait son affaire, il est vrai). Mais le meilleur est pour la fin : comme par hasard, Galam travaille dans un labo qui se préoccupe d’observer le désordre et la formation des opinions… mais bien sûr son avis n’a rien à voir avec le fait d’aller à la soupe !
Même si le livre fait 200 pages, nous allons nous arrêter là, sans traiter le reliquat de déclarations hors sujet, d’amalgames entre science, militants, politiques, et journalistes qui simplifient tout, et d’autres erreurs diverses, car parvenu à ce stade le lecteur a probablement compris que ce livre est à ranger dans la catégorie « auteurs burlesques ». Comme l’auteur travaille dans un labo qui doit normalement expliquer comment fonctionne la science, et comme, normalement, il est difficile d’obtenir un doctorat en physique en étant constamment incapable de raisonner correctement, la seule bonne question est la même pour Galam que pour ses « collègues » qui se sont mis à dérailler : pourquoi ? Quelle mouche l’a piqué ? Quel élément, nécessairement affectif ou émotionnel, l’a conduit à se mettre à éructer et à raconter n’importe quoi sur ce sujet alors que, en d’autres circonstances, il a su conserver des réflexes de raisonnement correct ? C’est ça, le sujet d’étude intéressant !